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bientôt, que, la surveillance des puissances signataires devant s’exercer dans une zone de vingt milles en mer à l’est de Madagascar, la France pût commencer par distraire de cette zone toute la région de ses eaux territoriales.

En outre, tout voilier devait être soumis, d’après les premières propositions anglaises, soit au droit de visite, soit à l’inspection des papiers. Or, dans la séance du 6 février 1890, lord Vivian et sir John Kirk vinrent faire la déclaration suivante : « Le gouvernement de Sa Majesté veut aller aussi loin que possible afin d’arriver à un projet d’entente acceptable pour toutes les puissances représentées ici. En conséquence, il est disposé, sous les conditions spécifiées ci-après, à limiter l’exercice du droit de visite à tout navire de moins de 500 tonneaux, pourvu que cette dernière condition, relative à la dimension des bâtimens, soit soumise à révision si l’expérience démontre qu’une modification est nécessaire. » C’était, à notre avis, donner une preuve de modération. On nous blâmera probablement d’en convenir, et l’on a déjà quelque peu raillé MM. Bourée et de Martens d’avoir écrit, au cours des travaux préparatoires, que les représentans du gouvernement britannique apportaient dans l’examen des mesures nécessaires pour combattre la traite « un esprit de parfaite conciliation. » Il est vrai qu’au même moment, et ce rapprochement est assez instructif, M. Thomas Barclay, avocat à la cour d’appel de Londres, critiquait en sens inverse cette partie même de l’acte au nom des traditions britanniques[1]. Entre ces deux excès, la route est facile. Du moment où les plénipotentiaires de la Grande-Bretagne ont accepté les clauses suivantes : «Les puissances signataires sont d’accord pour limiter le droit susmentionné (de visite, de recherche et de saisie) aux navires d’un tonnage inférieur à 500 tonneaux... Lorsque les officiers commandant les bâtimens de guerre de l’une des puissances signataires auront lieu de croire qu’un bâtiment d’un tonnage inférieur à 500 tonneaux... se livre à la traite ou est coupable d’une usurpation de pavillon, ils pourront recourir à la vérification des papiers de bord, » ils ont à peu près désintéressé le commerce français et mis, croyons-nous, nos propres plénipotentiaires dans l’impossibilité de refuser leur adhésion à l’œuvre commune.

Pourquoi? C’est que la navigation au long cours s’est transformée depuis un quart de siècle. D’abord, à l’emploi des voiles, on a très généralement substitué, du moins pour les expéditions lointaines, l’emploi de la vapeur. Or on n’expédie jamais des ports français, pour les mers qui baignent l’Afrique orientale, des vapeurs jaugeant moins de 500 tonneaux, et, d’autre part, les

  1. Le droit de visite, la traite et la conférence de Bruxelles, p. 38 et suiv.