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tomber dans l’autre, encore plus grave, de produire des assertions dénuées de preuves. Nous avons tenu, au contraire, à présenter au lecteur tous les élémens de la question pour qu’il pût en juger par lui-même, et là où le défaut d’espace nous a obligé d’omettre une partie de ces élémens, nous avons toujours indiqué les sources où l’on pouvait les trouver.

En triant les chiffres de la statistique, l’on peut arriver à telle conclusion qu’on veut bien se proposer d’avance, et la vérité même peut être présentée sous un jour exagéré. Nous avons tenu à éviter soigneusement de tomber dans ce défaut. Ainsi, par exemple, si nous nous étions borné à comparer les chiffres de certaines exportations italiennes en 1887 et en 1890, nos conclusions s’en seraient trouvées renforcées. Mais nous aurions été coupables de les avoir exagérées. L’année 1887 a été exceptionnelle pour le commerce de l’Italie. En prévision de la rupture du traité de commerce avec la France, les exportations de l’Italie pour ce pays se sont trouvées portées au-dessus de ce qu’elles auraient été normalement. Nous avons cru de notre devoir d’en avertir le lecteur, et de lui mettre sous les yeux, comme terme de comparaison, les chiffres de l’année 1886, que tout indique avoir été une année normale. De même nous n’avons pas voulu donner aux chiffres de la statistique plus d’autorité qu’ils n’en peuvent avoir, et nous avons indiqué avec soin les cas douteux. Ayant pris toutes ces précautions les plus minutieuses, nous espérons que les conclusions qui se dégagent de ces faits pourront approcher de la vérité, autant que cela est possible dans une matière aussi compliquée. La science sociale ne fait que de naître, et l’on doit être d’une prudence extrême pour toute assertion qui s’y rapporte. Nous croyons toutefois qu’en ce cas les faits parlent d’eux-mêmes.

L’Italie était en voie de pleine prospérité, quand, vers la fin de 1887, s’est produite une recrudescence de la protection douanière, la rupture des relations commerciales et financières avec la France, et un rapprochement plus intime avec l’Allemagne.

Brusquement, sans transition aucune, à peine ces faits accomplis, une crise économique terrible sévit sur l’Italie, et continue jusqu’à présent. Cette crise n’est pas générale en Europe. Bien loin de là, dans les autres pays, le mouvement du commerce international et du commerce intérieur reçoit un accroissement considérable de 1886 à 1890.

Il faut donc qu’il y ait eu une cause spéciale pour la crise italienne. Et cette cause, où la trouver, si ce n’est dans les faits que nous venons de rappeler? Quels autres nouveaux faits se sont produits d’une telle importance qu’on puisse leur attribuer des effets