emporter une position couronnée par une artillerie ennemie qui ne serait pas en nombre suffisant ? En aucune façon. Mais elle commencerait par joncher la terre de cadavres et, si la crainte de la mort ne saurait arrêter aucun officier digne de ce nom quand il s’agit d’une impérieuse nécessité, aucun officier n’a le droit de sacrifier inutilement un seul homme qu’il pourrait employer ou sacrifier utilement ailleurs. L’infanterie ne doit donc agir que sous le feu, c’est-à-dire sous la protection de l’artillerie, qui a pour mission expresse de nettoyer la place que l’infanterie, protégée par elle, doit emporter et occuper. A l’exception des compagnies franches, dont le rôle est de chercher et de harceler l’ennemi pendant les marches et qui doivent être, selon la formule, « de la cavalerie démontée, » l’infanterie, quand elle est isolée de l’artillerie, est impuissante. La théorie est impérative et la pratique n’a point cessé de la justifier. Pourquoi, à la bataille du 7 septembre, la critique a-t-elle jugé, par exemple, que le 6e corps avait victorieusement conservé les positions qui lui avaient été assignées dès le début de la journée ? Tout simplement parce que son chef avait su garder sous la main, sur la crête du Bois-Cornet, son artillerie qui ne cessa de faire rage sur les masses assaillantes du 8e corps jusqu’au moment où, la canonnade ayant réduit au silence les premières batteries ennemies, l’infanterie, se démasquant avec rapidité, pût couvrir de ses feux tout le terrain des attaques. Et de même, le 14, à la bataille de Margerie-Haucourt, où l’infanterie des 6e et 8e corps réunis ne sonna la charge et ne s’élança sur le joli village qui était la clef de la position que sous le feu de l’artillerie qui avait préalablement éteint le feu des batteries du Meldançon. Il ne s’agissait pourtant ce jour-là que d’un ennemi figuré et, si le général Saussier, qui commandait en chef, n’avait eu souci que de l’effet théâtral à produire, rien ne lui aurait été plus facile que de lancer tout de suite sur Margerie, au son des clairons, les colonnes d’attaque des généraux de Kerhué et Jamont. Dans la grande plaine que traverse le ruisseau du Puits, sous le beau soleil qui avait dissipé les nuages de la matinée et qui faisait scintiller comme une moisson d’acier les milliers de fusils des armées réunies, la grandeur du spectacle eût été incomparable. Mais quoi ! cet assaut, que n’aurait préparé aucun duel d’artillerie, eût été un défi à la réalité, et c’est d’autres leçons que le général Saussier s’était proposé de donner à ses troupes.
Après l’absence des projectiles, la seconde convention des manœuvres consiste dans la fixation préalable de tous les mouvemens, marches et contremarches, des armées. Où se dérouleront les drames grandioses et sanglans de la prochaine guerre ? Si l’offensive diplomatique appartient à notre adversaire, le temps