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d’un républicain, — abdiqué leurs passions et leurs préférences ; forts du concours de quatre chefs d’État également patriotes, des ministres de la guerre qui se sont appelés Leflô, Cissey, Berthaut, Borel, Gresley, Farre, Billot, Lewal, Campenon, Logerot, Ferron, Freycinet, n’ont reculé devant aucune responsabilité ; aucun effort n’a rebuté, sous l’aiguillon des inoubliables leçons de l’année terrible, des chefs de corps qui se sont appelés Chanzy, Ducrot, Clinchant, Henri d’Orléans, Février, pour ne parler que de ceux qui sont morts à la peine ou qui, ayant été des premiers parmi les semeurs, n’ont pas eu la joie de prendre part à la moisson ; depuis les officiers les plus éminens de l’École supérieure de guerre jusqu’au simple soldat, jusqu’au réserviste ou au territorial, toujours prêt à répondre à l’appel, l’armée nationale tout entière, la « nation armée » a donné tout ce qui lui était demandé. Mais cette reconstitution de nos forces, œuvre de la nation tout entière, si elle est faite pour inspirer à tous la confiance dans l’avenir, pour donner à tous le sentiment que le droit aura désormais la force à son service, cette reconstitution n’est pas achevée, et, en tout cas, elle n’est point parfaite. Beaucoup a été fait, beaucoup reste à faire, — et ce qui reste à faire doit être fait. Le destin, qui semble nous être redevenu favorable, nous accordera-t-il d’essayer d’abord dans une nouvelle expérience pacifique, d’ici deux ou trois ans, l’instrument dont l’expérience d’hier a indiqué les dernières défectuosités ? L’avenir n’est à personne. Mais quel que soit l’inconnu de demain, quelque redoutable qu’il soit pour ceux-là surtout qui, prêts dès aujourd’hui à la guerre, ne feront jamais rien pour troubler la paix, le devoir reste le même. Nous avons su l’accomplir jusqu’ici, dans l’union patriotique de tous ; nous saurons l’accomplir jusqu’au bout.


J. R.