attitrés du commerce et de l’industrie en faveur de la conclusion de traités à tarif conventionnel, aussi étendus que possible, avec les États européens. Après avoir narré les péripéties des négociations avec l’Autriche-Hongrie, le mémoire contient cette déclaration caractéristique : « Pour le cas où l’on réussirait à conclure un traité avec tarif conventionnel sur de vastes proportions entre deux États constituant un territoire considérable au centre de l’Europe, on pouvait s’attendre à ce que ce traité devînt un point de cristallisation pour des conventions ultérieures avec d’autres États et de ceux-ci entre eux, l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne pouvant offrir les concessions faites entre elles à des États tiers contre des concessions équivalentes et pouvant par là déterminer ces États à s’attacher à une politique modérée, fondée sur les traités, et à renoncer à l’adoption d’un protectionnisme extrême. »
Tout ce document porte la trace de cette raison ferme et prévoyante : la politique douanière inaugurée en 1879, y est-il dit, est devenue nuisible aussitôt que d’autres États ont suivi l’exemple de l’empire ; il est nécessaire de ne pas porter un coup funeste au pouvoir d’exporter ; les droits sur les céréales imposent un lourd sacrifice à la population ; en votant un droit de 5 marks (6 fr. 25), on a trop tendu l’arc ; l’hostilité économique est incompatible avec l’amitié politique.
Quand on rapproche tout ce langage de celui qui a été tenu, non pas seulement par M. Méline à la chambre des députés ou par M. Jules Ferry au sénat, mais même par M. Jules Roche, ministre du commerce, dans son exposé des motifs du projet de tarif douanier, on est confondu du contraste. On se demande si ces hommes sont bien du même temps : à coup sûr, ils n’appartiennent pas à la même catégorie d’esprits. Autant l’un voit les choses dans leur ensemble, dans tout leur développement, dans leurs conséquences différées et éloignées, aussi bien que dans leurs effets immédiats ; autant les autres paraissent empêtrés dans les minuties du détail, dans des calculs inextricables sur le prix de revient de chaque objet, dans l’affolement de tout produire, même ce à quoi le sol, la race ou l’éducation est rebelle. Un homme politique, malheureusement de l’autre côté des Vosges, une nuée de politiciens de ce côté-ci, ce sont les définitions qui correspondent à des hommes dont les conceptions sont si différentes.
On ne peut nier que l’idée politique n’ait fort influé sur les traités de commerce allemands ; cette idée politique est double ; elle vise les rapports internationaux et la situation intérieure : faire de l’Allemagne un centre de cristallisation de la civilisation européenne ; octroyer spontanément aux socialistes quelques concessions au point de vue du bien-être matériel des classes