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Quels que soient les argumens qu’on emprunte aux traités allemands pour essayer d’en diminuer l’importance, il n’en est pas moins vrai qu’ils constituent un phénomène politique et économique des plus considérables. C’est le triomphe des traités de commerce à long terme et à tarifs fixes ; c’est un groupement de nations qui, pour n’être pas encore très étroit, a des chances, avec le temps, de se resserrer davantage. Au point de vue économique, on a calculé que les nouveaux droits, en supposant stationnaire le chiffre des échanges internationaux, produiraient au trésor 110,105,481 marks au lieu de 145,269,635 marks que produisent les droits actuels, soit une diminution de 35,154,000 marks, ou 44 millions de francs ; l’ensemble des droits serait donc réduit d’un quart environ.


IV

Le gouvernement français, quand il présenta aux chambres, à l’automne de 1890, sa fameuse combinaison du tarif maximum et du tarif minimum, croyait avoir découvert un régime automatique et d’un fonctionnement simple. « Les droits inscrits au tarif minimum pourraient être appliqués aux marchandises originaires des pays qui feraient bénéficier les marchandises françaises d’avantages corrélatifs, et en premier lieu qui ne frapperaient pas nos produits de droits supérieurs à ceux dont sont frappées les autres nations. Mais, à elle seule, cette condition ne serait pas suffisante ; il faudrait, en outre, que ces droits ne fussent pas tellement élevés qu’ils constituent un obstacle insurmontable à nos exportations. » Ainsi s’exprimait l’exposé des motifs de M. Jules Roche. Quant au tarif maximum, il devait atteindre les produits des nations qui n’accorderaient pas tout au moins à la France le traitement de la nation la plus favorisée ou dont les droits, même avec ce traitement, seraient regardés comme excessifs. A s’en tenir à ces termes, le régime nouveau était déjà d’une bien difficile application et prêtait à l’arbitraire. Mais l’on poussa la complication plus loin. Le gouvernement avait soin de dire qu’il se réservait la faculté d’appliquer des droits plus élevés encore que ceux du tarif maximum aux produits de certains pays dont le régime douanier serait particulièrement rigoureux pour la France : on visait ainsi l’Italie qui se trouvait encore sous l’étreinte de M. Crispi, peut-être aussi les États-Unis dont les récentes mesures douanières alarmaient le public français. Pour compléter la série des contradictions aussi bien dans les choses que dans les mots, le gouvernement, tout rougissant de son œuvre, est venu déclarer, par l’organe du ministre des affaires étrangères, qu’il se réserve de conclure des