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Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 111.djvu/527

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qui ne se lasse plus d’opposer aux fautes des plaintes, aux injustices le droit, et la lumière aux sophismes. Et quel parti a jamais laissé à ses adversaires tant de chances de triompher devant l’opinion ?

Mais pour avoir accès auprès d’elle, n’oubliez pas ce que vos longues défaites ont dû vous apprendre. L’évidence même, si elle lui est présentée par des royalistes, ne la convaincra pas. Elle est, autant qu’on peut parler de perpétuité quand il s’agit de volontés humaines, fixée contre la monarchie, et le premier des intérêts conservateurs lui paraît la conservation du régime fondé depuis vingt ans. Si donc vous voulez qu’elle prête l’oreille à vos revendications les plus légitimes, il faut que vos personnes cessent de lui être suspectes, et, pour qu’elle se détache des hommes aujourd’hui au pouvoir, il faut qu’elle puisse porter sa confiance sur des hommes autrement, mais aussi républicains.

La nécessité renverse tout l’ordre de vos desseins : au lieu de demander la paix au parti qui gouverne pour vous rallier à la république, vous devez d’abord vous rallier à la république pour disputer à ce parti le gouvernement.

Quoi ! adhérer à ce régime à l’heure où redouble l’hostilité contre l’Église ? — Vous cesserez de vous indigner en cessant de confondre la république et les hommes qui aujourd’hui la représentent. La république est l’ensemble des lois qui règlent l’exercice et la transmission de l’autorité nationale : l’accepter en France, c’est tenir pour légitime que l’autorité soit conférée par le peuple à des mandataires temporaires, ce n’est pas tenir pour sages et indiscutables les actes de ces mandataires. Avant que ses représentai actuels fussent élus, la république était, ils disparaîtront sans qu’elle succombe. — La république elle-même n’est-elle pas déshonorée par le mal commis en son nom ? — Exactement comme la monarchie le serait par les excès d’un prince. Les parlemens injustes sont à la république ce que les mauvais rois sont à la monarchie. La seule différence est que, sous la royauté, vous attendriez du temps seul la réforme ou la mort du mauvais prince, et que, sous la république, vous êtes maîtres de préparer dans des élections toujours prochaines la fin des partis dangereux. — Ce sera un vain sacrifice d’apporter à cette république une adhésion que les républicains ne tiendront jamais pour bonne ! — Si vous aspiriez à grossir les rangs des radicaux et des opportunistes, on comprend que leur désaveu vous fût un embarras. Mais si vous prétendez constituer un parti hors d’eux, quelle compétence est la leur pour vous admettre ou vous rejeter ? Quel parti se serait jamais fondé s’il avait attendu l’agrément de ses rivaux ? Si vous vous