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phorique, 6 à 15 pour 100 environ ; le reste est constitué par du calcaire inerte. En certains endroits, cette craie a subi, sous l’influence des eaux d’infiltration, un véritable lavage qui en a éliminé la plus grande partie du calcaire et a ainsi produit une concentration du phosphate, qu’on trouve alors sous forme de petits grains, constituant ce qu’on appelle le sable phosphaté ou le phosphate arénacé.

Dans les environs de Doullens se trouvent les plus riches exploitations de sables phosphatés ; ce sont celles de Beauval, de Beauquesne, de Terramesnil, de Puchevillers, etc. Le gisement se continue dans le Pas-de-Calais où il est exploité, notamment à Orville. Dans ces localités, le sable phosphaté se rencontre sous une couche d’argile à silex et peut être exploité à ciel ouvert. Dans d’autres localités, telles que Hallencourt et Breteuil (Oise), le sable phosphaté est moins abondant et la craie phosphatée domine.

Les géologues ne sont pas tous d’accord sur l’origine organique ou minérale de ces gisemens ; mais l’examen microscopique qu’ont fait de ces produits M. S. Meunier et M. Olry a montré que les grains phosphatés affectent souvent la forme cristalline. Cette observation a une grande importance au point de vue de l’emploi direct des produits, car la cristallisation y détermine une dureté qui les rend plus réfractaires à l’action des racines des plantes et diminue ainsi leur efficacité. Aussi n’est-ce qu’après leur transformation en superphosphates que les agriculteurs les utilisent.

Les phosphates arénacés sont activement exploités ; déposés à flanc des coteaux dans des sortes de poches, recouverts d’une simple couche d’argile, ils n’exigent que peu de frais d’extraction ; ils ont en outre une grande richesse (jusqu’à 42 pour 100 d’acide phosphorique) qui les fait rechercher pour la fabrication des superphosphates. Les propriétaires qui trouvent dans leurs terres des poches à sable phosphaté réalisent des bénéfices parfois énormes.

Mais ces poches de sable phosphaté proprement dit sont peu fréquentes et s’épuisent assez rapidement. C’est la craie qui constitue le véritable gisement d’acide phosphorique de l’étage sénonien. On la trouve sur d’immenses étendues avec une faible teneur en acide phosphorique (6 à 12 ou rarement jusqu’à 15 pour 100). Aussi les craies, renfermant de grandes quantités de matières inertes, sont-elles peu recherchées ; leur valeur vénale est extrêmement minime. Elles ne se prêtent ni à l’emploi direct, ni à la transformation en phosphates acides. C’est seulement si l’on parvenait, à réaliser économiquement la concentration de l’acide phosphorique, pour rapprocher leur composition de celle des phosphates arénacés, qu’on pourrait faire entrer dans la circulation végétale et