Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 113.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour l’écriture en lettres d’or, pour les soudures et collages, et autres documens techniques. » M. Giry, de l’École des chartes, a collationné ce manuscrit sur place, et il a eu l’extrême obligeance de me communiquer sa collation, qui est fort importante.

Les Formules de teinture ne constituent pas un livre méthodique, tels que nos ouvrages modernes sur l’orfèvrerie, ou sur la céramique, coordonnés d’après la nature des matières. C’est un cahier de recettes et de documens, récoltés par un praticien en vue de l’exercice de son art et destinés à lui fournir à la fois des procédés pour l’exécution de ses fabrications et des renseignemens sur l’origine de ses matières premières. Les sujets qui y sont exposés sont les suivans : coloration ou teinture des pierres artificielles, destinées à la fabrication des mosaïques ; leur dorure et argenture, leur polissage ; fabrication des verres colorés en vert, en blanc laiteux, en rouge de diverses nuances, en pourpre, en jaune ; colorations tantôt profondes, tantôt superficielles, parfois même réalisées à l’aide de simples vernis. La fabrication du verre est accompagnée par une description sommaire du fourneau des verriers, laquelle se retrouve avec des développemens de plus en plus grands chez les auteurs postérieurs, tels que Théophile, et plus tard les écrivains techniques et alchimiques de la fin du moyen âge : la filiation historique de ces procédés et appareils est par là rendue manifeste.

La teinture des peaux en pourpre, en vert, en jaune, en rouges multiples, sujet où les Égyptiens étaient fort avancés, et qui s’est perpétué chez les Byzantins, puis la teinture des bois, des os et de la corne, sont aussi signalées. On trouve encore dans cet ouvrage la mention des minerais, des métaux, des terres usités en orfèvrerie et en peinture. On y voit apparaître des idées singulières sur le rôle du soleil et de la chaleur, propre à certaines terres chaudes, pour la production des minerais, doués de vertus correspondantes ; tandis qu’une terre froide produirait des minerais de faible qualité. Ceci rappelle les théories d’Aristote sur l’exhalaison sèche, opposée à l’exhalaison humide dans la génération des minéraux, théories qui ont joué un grand rôle au moyen âge.

L’auteur distingue un minerai de plomb féminin et léger, opposé à un minerai masculin et lourd : distinction pareille à celle des minerais d’antimoine mâle et femelle, dont parle Pline ; aux bleus mâle et femelle de Théophraste et à diverses indications du même genre : l’assimilation des minéraux aux êtres vivans est continuelle dans la chimie du moyen âge.

On lit également dans cet ouvrage des articles développés sur certaines opérations, telles que l’extraction du mercure, du plomb,