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LA
RÉFORME DE MALHERRE
ET
L’ÉVOLUTION DES GENRES

De dire que, dans l’histoire de la littérature et de l’art, comme dans la nature même, les genres, sous l’influence de causes qui ne diffèrent pas beaucoup de ce que l’on appelle des noms de concurrence vitale et de sélection naturelle, évoluent et se transforment, il semble à de fort bons esprits que ce ne soit après tout qu’une métaphore ambitieuse, mais non pas l’expression de la réalité des choses, et bien moins encore le principe d’une méthode féconde. Je suis persuadé, pour ma part, qu’ils ont tort, et, ici même ou ailleurs, à diverses reprises, c’est ce que j’ai tâché de montrer. Mais, puisqu’il n’y a pas de raisonnement, — fût-il d’Aristote ou de saint Thomas en personne, — dont le pouvoir démonstratif égale celui d’un bon exemple, bien choisi, bien développé, je suis heureux que deux ou trois publications récentes me procurent aujourd’hui l’occasion d’en étudier l’un des plus instructifs assurément qu’il y ait dans l’histoire entière de notre littérature. Je veux parler de la réforme, — ou plutôt de la transformation, — qui s’est opérée dans notre poésie, de 1605 à 1630 environ, et à la- quelle, depuis deux cent cinquante ou soixante ans passés, on est convenu d’attacher le nom de Malherbe. Il y en a peu de plus profondes ;