pour la France. Heureusement pour lui, la loi des suspects allait être rapportée.
Enfin nous trouvons l’épilogue de toute l’affaire dans une pétition de la veuve et de la fille de Beaumarchais au consul Cambacérès, pour obtenir que l’affaire fût liquidée par le conseil d’État. « Le nom de Beaumarchais ne vous est pas inconnu, y disait sa veuve ; personne n’était plus capable que vous d’apprécier ses grandes qualités, son énergie et son patriotisme… Nous avons succédé à ses peines et à 600,000 livres de dettes. Voilà tout notre héritage. » Elle ajoutait : « C’est une affaire qui a détruit notre tranquillité et notre fortune. » Il est vrai, mais plaie d’argent n’est pas mortelle, et celle-là fut assez vite guérie, comme nous l’avons prouvé ailleurs. Tout compte fait, comme finira par en convenir Gudin lui-même, qui d’abord s’échauffait contre l’imprudence apparente de son ami en mettant la frontière entre Robespierre et lui, cette même affaire des fusils lui avait sauvé la tête. Il put même la présenter aux lauriers, le 5 mai 1797, sur la scène du Théâtre-Français, alors émigré rue Feydeau, où le public le força de venir en personne, et constater avec une suprême joie, dans ses lettres à ses amis, qu’il y avait toujours en France une royauté debout, celle de l’esprit.
Nous ne pousserons pas plus loin cette démonstration de l’intérêt qu’il y aurait à publier Beaumarchais inédit. Une vaste correspondance relative à toutes les époques de sa vie ; tout un recueil de pensées et de maximes ; d’intéressans opuscules ; des variantes précieuses de toutes ses œuvres connues, comme cet acte inédit du Barbier de Séville que nous avons fait jouer plusieurs fois à l’Odéon, où il supporta si gaillardement la double épreuve de la représentation et du voisinage du reste de la pièce ; une quantité considérable de documens variés et de mémoires relatifs à l’affaire des auteurs dramatiques, avec des lettres de la plupart des hommes de théâtre du temps, à la guerre d’Amérique, et surtout à la révolution, telles sont les principales richesses des portefeuilles de Beaumarchais. Joignons-y, pour en illustrer l’édition future, tout un musée de souvenirs artistiques, qui, murés avec les manuscrits, dans une maison de Neuilly, ont échappé ainsi, grâce à la vigilance des descendans de Beaumarchais, aux bombes de la guerre et de la Commune. On y trouve le superbe portrait de notre auteur par Nattier, qu’on a pu admirer à l’exposition rétrospective de 1879 ; ceux de la plupart de ses proches, des vues peintes de son célèbre hôtel et de ses jardins dont une, prise du dedans, donne, par une large baie de la salle à manger de