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Il nous reste à résumer les points principaux de cette étude et à en rappeler brièvement les résultats.

Bien que le rachat des chemins de fer ait été réellement motivé par des considérations d’ordre politique et militaire, c’est principalement le point de vue économique et financier que le gouvernement a fait envisager au public. On a vanté les bienfaits que procurerait la substitution de l’État aux compagnies privées en assurant la réduction des tarifs, l’amélioration de toutes les branches du service, la conduite de l’exploitation en conformité des intérêts généraux du pays.

En fait, comme on pouvait s’y attendre, ces perspectives n’ont pas été réalisées. Par une interprétation abusive de la loi de 1882, l’État a employé chaque année la plus grande partie du produit net disponible à alimenter le budget général ; il s’est accoutumé à considérer les chemins de fer comme une source de revenus indirects pour le trésor et a cherché surtout à assurer à ce revenu le maximum de rendement ; le point de vue fiscal a été substitué au point de vue économique.

Dans ces conditions, l’administration des chemins de fer de l’État est devenue une entreprise commerciale, ayant surtout en vue la réalisation d’un bénéfice. Les réformes radicales annoncées à l’époque du rachat n’ont pas eu lieu ; le développement de la tarification a été effectué d’après des principes exclusivement commerciaux ; les dépenses ont été étroitement limitées, au détriment même de certaines mesures d’amélioration ou d’entretien indispensables, qui ont été reculées jusqu’à la dernière limite.

En ce qui concerne spécialement les tarifs, il n’y a eu à aucune époque de réduction générale. La réforme de 1878, qui est due d’ailleurs à l’initiative des compagnies privées, a été faite uniquement en vue de la simplification et de l’uniformisation des tarifs ; elle a eu pour effet principal, non de réduire individuellement le prix des transports, mais d’inciter le public à remettre au chemin de fer des chargemens complets, soit en condensant ses expéditions, soit en s’adressant à des intermédiaires. Il est résulté de ce fait, à vrai dire, une certaine diminution de recettes pour le chemin de fer, mais elle n’a profité qu’en partie au public, et elle a d’ailleurs été compensée, pour celui-ci, par des charges additionnelles, notamment en ce qui concerne la manutention et les frais accessoires.

Depuis la réforme de 1878 et les mesures complémentaires prises en 1880, il n’a pas été fait de modification générale des tarifs. Il y a eu des améliorations apportées, des réductions de prix réalisées, mais elles sont résultées de mesures partielles, telles