et se vengea « en faisant courre sur cette rencontre un écrit plein de faussetés et d’impostures, » auquel Ogier, cela va sans dire, s’empressa de répliquer. Il y avait à La Haye un prédicateur français nommé de Maury, « mieux disant que les autres. » Après s’en être longtemps défendu, Ogier se résolut à aller l’entendre. Le lendemain, l’église brûla, et il fit aussitôt un sonnet, où il exprimait la joie féroce que lui avait causée cet embrasement providentiel :
Prêcheurs sans mission, anarchiques ministres,
Voici de votre fin les augures sinistres ;
Ce feu purge mon temple et brûle votre cœur.
Il est heureux, en vérité, qu’on ne l’eût pas chargé de négocier le traité de Westphalie. La politique de Richelieu et de Mazarin lui agréait peu, l’alliance de la France avec l’hérétique Suède lui inspirait une secrète horreur, et il eut peine à pardonner aux trois plénipotentiaires français le duc de Longdeville, le comte d’Avaux et Servien d’avoir consenti à servir de parrains à une fille du résident suédois, laquelle fut baptisée chez lui par son ministre luthérien. « C’est là, écrivait-il en latin dans son journal, une action condamnable et perverse et du plus triste exemple. » Le comte d’Avaux paraît s’être amusé plus d’une fois des indignations de son atrabilaire aumônier, qui avait plus d’indulgence pour les libertins que pour les réformés.
Le mardi 15 mars 1644, on avait quitté Deventer ; le 16, on couchait à Steinfort, dans une commanderie de Malte, dont le chapelain « était plus curieux de jambons que de livres, » et le jeudi 17, on s’en alla d’une traite à Munster. Ces dernières journées furent lugubres ! « Il ne se peut imaginer un chemin plus mauvais que celui que nous eûmes ces trois jours, et principalement dès que nous fûmes dans la Westphalie, qui est l’image de l’ancienne Germanie, inculte, désagréable, pleine d’eaux dormantes et de fondrières. À cela il faut ajouter la saison d’hiver et le mauvais temps ; la neige fondue nous pénétrait jusque dans les os. La moitié du temps, nous étions dans des chemins creux, où nos chevaux nageaient plus souvent qu’ils ne marchaient. Des chariots versèrent et se trouva force gens de bien mouillés jusqu’au collet. Mes papiers le furent, de sorte que celui que je voulais particulièrement conserver en portera les marques tant qu’il durera. » Il disait vrai, le manuscrit de la Bibliothèque nationale, retrouvé et déchiffré par M. Boppe, porte en effet les traces de cet accident, qui en a rendu en plus d’un endroit la lecture très difficile. Mais on fit grand accueil à ces gens mouillés et crottés. Munster avait été déclaré ville neutre pour toute la durée du congrès. Le gouverneur, qui était un général de l’empire, se porta à la rencontre du comte d’Avaux. « On lui fît une belle salve de canons et de mousquets, et étaient la garnison et les bourgeois en armes, les boutiques et les fenêtres pleines