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Page:Revue des Deux Mondes - 1893 - tome 120.djvu/178

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Bref, grâce au concours du baron Savarèse et du prince Torella, la cause de la science fut définitivement gagnée.

L’appui moral de l’Académie de Berlin n’avait pas encore revêtu la forme de subvention, et les travaux auraient assez longtemps langui, si le consul général allemand, M. Beer, n’eût avancé en diverses fois 80 000 francs ; et ceci permit à la station naissante d’attendre la subvention annuelle de 30 000 marks, portée depuis à 40 000 marks, que le Reichstag inscrivit au budget de l’Empire.

Il ne suffisait pas d’avoir des bâtimens, il fallait encore un budget annuel qui permît le travail. Ouverte en février 1874, la station n’a pas depuis cessé de prospérer. Il y est actuellement dépensé tous les ans plus de 100 000 francs pour entretien, acquisition de réactifs, d’instrumens et de matériel d’études. Le personnel des collaborateurs scientifiques permanens et d’employés de toutes sortes comprend plus de 40 personnes. Ces chiffres n’indiquent-ils pas déjà un énorme mouvement ? Quelques autres préciseront davantage peut-être. On consomme chaque année 10 000 francs d’alcool, 6 000 de réactifs divers, 6 000 de verrerie. Quelles sont donc les sources de ce beau revenu ? La réponse à cette question présente, il me semble, plus d’intérêt pour nous Français que pour personne, car nous sommes peu accoutumés à voir des établissemens scientifiques prospérer grâce à des dons, rentes ou subventions provenant de particuliers, de sociétés savantes ou d’Etats étrangers. L’Institut Pasteur constitue une récente et remarquable exception ; mais d’abord les souscriptions étrangères ont largement afflué, et, de plus, il n’est peut-être pas inexact de croire que beaucoup d’offrandes nationales sont allées à l’œuvre de bienfaisance, à l’hôpital traitant la rage, autant, sinon plus, qu’au laboratoire de recherches.

Par contrat valable pour 2, 3 ou 5 ans, un particulier, une société savante, un gouvernement, moyennant une cotisation annuelle de 2 500 francs, a droit à ce qu’on appelle une « Table » à la station zoologique de Naples, c’est-à-dire que le particulier, la société savante ou le gouvernement peut pendant toute l’année faire occuper par un travailleur une place dans le laboratoire ; et on lui fournit à la station tous les instrumens, tous les réactifs, tous les animaux dont il a besoin ; il dispose de tous les livres de la bibliothèque : il est chez lui, dans la mesure, naturellement, où son activité n’est pas comprimante pour l’activité des voisins. Il est aisé de prévoir que, sans parler même de leur zèle bien prouvé pour la science, le directeur de la station et ses collaborateurs vont jusqu’à la limite du possible pour donner satisfaction à tous les travailleurs ; car la durée des contrats, c’est-à-dire la source du revenu, a pour facteur essentiel la satisfaction des contractans.