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Page:Revue des Deux Mondes - 1894 - tome 121.djvu/714

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 janvier.


Le principal fait politique de ces derniers jours est un fait financier : la conversion en 3 1/2 pour 100 des 7 milliards de francs de notre dette nationale qui rapportent annuellement 4 1/2. À partir du 16 février prochain, l’État français, au lieu de 305 millions de francs qu’il paie aujourd’hui, ne paiera plus, pour ce capital, que 237 millions d’intérêts annuels ; d’où une économie de 68 millions pour le budget.

Cette opération, colossale parle chiffre sur lequel elle porte, simplement conçue de manière à être facilement comprise, a été acceptée par les porteurs de ce titre, depuis longtemps préparés à cette éventualité, sans enthousiasme, — cela va sans dire, — mais non pas avec cet esprit morose et ce « pâle visage » des rentiers classiques,

À l’aspect d’un arrêt qui retranche un quartier
de leurs arrérages, puisqu’il leur était loisible de se faire rembourser à 100 francs une valeur émise, il y a vingt ans, aux environs de 83 francs. Aucun d’eux d’ailleurs ne pouvait songer à user de cette faculté du remboursement au pair, par les guichets de l’État, lorsqu’il lui était loisible de vendre le même titre à la Bourse, avec une prime de 4 ou 5 francs. Les gazettes du XVIIe siècle plaignaient, en semblable occurrence, les rentiers du Trésor qui, faute de toucher leurs coupons, étaient menacés « d’aller de l’Hôtel de Ville à l’Hôtel-Dieu » ; nos rentiers contemporains, inscrits au grand-livre de la nouvelle dette 3 1/2, sont en quelque manière des privilégiés, puisque le 3 pour 100 lui-même se cote fort près du pair et qu’ils sont garantis, pendant huit années, contre toute conversion nouvelle.

La loi, votée sur la proposition du ministre des finances, s’est sagement gardée des deux écueils redoutables en semblable matière : d’une part, de donner un trop grand avantage aux porteurs des rentes À 1/2 pour 100, et de provoquer ainsi la baisse des rentes 3 pour 100 ; d’autre part, de mécontenter ces porteurs, en présumant trop du crédit