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leur. Il avance et recule, se livre et se reprend. Est-ce défaut de sincérité ? C’est plutôt excès d’abandon, et c’est plutôt faiblesse que calcul ; c’est impuissance à se fixer plutôt que goût et besoin de tromper ; c’est désir de plaire, d’être applaudi, d’être entouré, et il y a comme de la coquetterie en ce vicaire du Vicaire de Jésus-Christ. Au fond et par d’autres côtés, il se rapprocherait plus de Pie IX que de Léon XIII. Tout récemment il publiait pour le centenaire du feu pape un Invito sacro, dont voici le principal passage : « Quand Pie IX s’est éteint, quand l’annonce de sa mort s’est répandue d’un bout à l’autre de l’univers, nos ennemis, les ennemis de la Papauté, eurent un moment d’allégresse et leurs lèvres laissèrent échapper cette phrase qui exprimait les désirs de leurs cœurs : La Papauté est morte ! Mais le Dieu qui sait consoler les justes a lancé dans l’espace immense du ciel cette merveilleuse étoile : Léon XIII, lumen in cœlo. Le monde, à sa vue, est tombé dans l’admiration et les ennemis de l’Eglise eurent de nouveau une preuve irrécusable de la divinité de cette institution, créée par Dieu pour opérer toujours plus de miracles. Malgré tout, la grande figure de Pie IX demeure toujours là ; qui plus est, elle paraît avoir encore grandi, illuminée par les rayons vivifians de l’étoile de Léon XIII. » Pour qui sait lire entre les lignes et en dépit de l’effet de style sur l’étoile merveilleuse, le pape du cardinal Parocchi, c’est Pie IX ; Pie IX qui fut grand et ne fait que grandir, à la lumière du pontificat de Léon XIII, « Pie IX le glorieux, Pie IX l’immortel ! »

Comme le cardinal-vicaire et à la différence du secrétaire d’État, le Grand Pénitencier conserve ses fonctions après la mort du pape qui les lui avait confiées. Il préside, en effet, le tribunal de la Pénitencerie qui a sur les consciences une magistrature suprême. C’est à ce tribunal sacré « qu’on a recours pour demander l’absolution de ses fautes, quand elles sont d’une telle nature qu’elles échappent à la compétence du confesseur ordinaire. » Le droit d’absoudre ne peut être, dans l’Eglise, suspendu ni interrompu, pas plus que la souveraineté du Saint-Siège elle-même. Ce que la mort suspend ou interrompt, c’est le pouvoir personnel du pape. Mais le Sacré-Collège le garde et le nouveau pape le retrouve dans toute son intégrité. Si donc des chrétiens frappés de censures réservées au Souverain Pontife sont, pendant l’interrègne, en danger de mort imminente, c’est le grand pénitencier qui peut les relever des peines encourues. Le grand pénitencier remplit publiquement, du reste, les devoirs de sa charge, quatre fois chaque année, le dimanche des Rameaux à Saint-Jean de Latran ; le mercredi de la semaine sainte, à Sainte-Marie-Majeure ; le jeudi et le vendredi de la même semaine, à Saint-Pierre.