27 janvier ; mais nous avons encore des ressources ouvertes dans l’État de Venise. L’exemple des ennemis, la partialité que les Vénitiens ont montrée pour eux, et les griefs que nous avons contre cette puissance nous dispensent de ménager son territoire. » Quant au pape, c’est le grand point de dissidence entre les Directeurs et le général. Ils m ; comprennent pas plus sa politique qu’ils n’ont d’abord compris celle de Hoche. Le culte romain, écrivent-ils à Bonaparte, le 3 février, est l’obstacle le plus dangereux à l’affermissement de la constitution française ; c’est à Bonaparte de l’abattre en éteignant le flambeau du fanatisme en Italie et en détruisant le centre de l’unité romaine. Toutefois même sur cet article qui les passionne le plus, ils s’en remettent encore à lui : « Ce n’est point, au surplus, un ordre que donne le Directoire exécutif ; c’est un vœu qu’il forme… Quelque soit le parti que vous croyiez devoir prendre dans celle circonstance, et quelle qu’en soit l’issue, le Directoire exécutif n’y verra jamais de votre part que le désir de servir avantageusement votre pays… Il s’en rapporte au zèle et à la prudence qui vous ont constamment dirigé… »
Telles sont les nouvelles que Clarke apporte à Bonaparte le 18 février. Bonaparte en conclut que le traité de Tolentino sera ratifié comme l’ont été et comme le seront tous les faits accomplis qu’il imposera au Directoire, il a l’opinion pour lui en France ; et il est plus résolu que jamais à donner la paix. Il sait que le Directoire, s’il lui en laisse le temps, la rendra indéfiniment impossible, élevant, à chaque succès, des exigences qui nécessiteront des succès nouveaux, et laisseront toujours le sort de l’État en suspens jusqu’à la prochaine bataille. Cette conduite, qui sera la sienne plus tard et qui entraînera sa ruine, il en discerne alors le péril, et il veut l’éviter. Il traitera ; il voit le Directoire disposé à des concessions, au moins provisoires, sur l’article du Rhin ; il imagine que l’émancipation du nord de l’Italie flattera l’imagination des Français comme elle flatte la sienne. Venise, décidément, sera la rançon du Milanais. Le Directoire trouve légitime l’invasion et le dépouillement de celle république ; Bonaparte fera un pas de plus : après l’avoir rançonnée, il la démembrera. Il y préparera le Directoire en lui montrant que cette « extension » de ses projets est le seul moyen de transiger avec l’Autriche ; il y préparera l’opinion en multipliant les griefs et en poussant la querelle de façon à rejeter tous les torts sur les Vénitiens. Par un mélange d’hostilités qu’il provoquera pour motiver des représailles, de séditions qu’il suscitera afin de les réprimer, de complots qu’il soufflera afin de paraître les déjouer, il donnera au public français l’impression que cette oligarchie