La Grèce traverse une crise qui inquiète ses amis et qui met en péril ses institutions. Elle se débat contre des difficultés à la fois politiques, économiques et financières. Le régime parlementaire, pratiqué dans des conditions défectueuses, est discrédité. Le commerce d’exportation, fondé presque exclusivement sur la vente d’un seul produit, le raisin sec, a subi de ce chef des mécomptes tels qu’il en est résulté une brusque disette de numéraire et que la prime sur l’or, après s’être élevée un moment à 100 pour 100, se maintient encore aujourd’hui aux environs de 80 pour 100. Le Trésor public, écrasé par l’exagération des dépenses et des emprunts, a fait faux bond à ses engagemens et a réduit de 70 pour 100 les arrérages qu’il servait aux créanciers de l’État. A la faillite financière a succédé une débâcle politique. Le ministère Tricoupi, après s’être trouvé hors d’état de faire face au service de la dette publique, s’est également trouvé hors d’état de faire face aux difficultés gouvernementales. A la suite d’un conflit avec la population de la capitale et d’un dissentiment avec la Couronne, il a donné sa démission. Un ministère provisoire a été formé ; la Chambre a été dissoute. Les élections ont été fixées au 16 avril de l’année grecque, qui correspond au 28 avril de notre calendrier grégorien.
La crise a éclaté un peu avant la fin de 1893 pour arriver à son paroxysme dans les premiers mois de 1895 ; mais elle couvait depuis longtemps, et des observateurs attentifs avaient pu la prévoir.