reprendre dès maintenant les fondemens de la thermodynamique
et d’éviter, par de sages précautions, le trouble que jetterait dans la
science la mise en suspicion, même momentanée, de cette doctrine ?
D’ailleurs, cette revision est facile ; elle n’entraîne, dans l’exposition
de la théorie de la chaleur, qu’une bien légère modification. Sans
doute, l’ordre logique suivi par Clausius et ses successeurs invoque
la supposition que la chaleur est un mouvement ; mais quel usage
en fait-il ? Il lui demande seulement de servir de prémisse à la
démonstration de ce théorème : lorsqu’un corps parcourt un
cycle de modifications, la quantité de chaleur qu’il dégage est
dans un rapport invariable avec le travail qu’effectuent les actions
exercées de l’extérieur sur ce corps. Eh bien ! au lieu de faire
de cette proposition un théorème, et de démontrer ce théorème
par une conjecture sur la nature de la chaleur, pourquoi ne pas
la considérer comme un principe, comme une hypothèse physique
démontrée par l’ensemble de ses conséquences expérimentales, comme une sorte d’axiome analogue à celui dont Clausius
a fait usage pour sauver la théorie de Carnot du naufrage où
sombrait la croyance en une substance calorifique ? Les deux
parties de la thermodynamique se développeraient alors par des
procédés logiques semblables, indépendantes toutes deux de la
supposition que la chaleur est un mouvement, indifférentes au
sort que l’avenir de la science réserve à cette supposition.
Telle est la méthode prudente que, sans cacher sa prédilection pour les explications purement mécaniques, G. Kirchhoff
inaugura dans les leçons sur la théorie de la chaleur. Élève de
Kirchhoff, M. G. Lippmann rapporta cette méthode en France
et s’en fit le défenseur convaincu ; elle est aujourd’hui généralement adoptée dans l’enseignement de nos facultés et de nos
écoles, dans nos manuels et nos traités.
Lorsqu’un corps décrit un cycle fermé, la quantité de chaleur qu’il dégage est dans un rapport invariable avec le travail qu’effectuent les forces extérieures. Un corps qui décrit un cycle de Garnot ne peut emprunter de chaleur à une source froide pour en céder à une source chaude, à moins que les forces extérieures n’effectuent un certain travail positif. Telles sont les deux hypothèses fondamentales sur lesquelles repose la thermodynamique moderne. L’énoncé de ces deux hypothèses fait intervenir une même notion, la notion de la quaiitité de chaleur dégagée par un corps