retentissante, qui excluait le clergé de la direction des écoles. Cette semi-laïcisation, péniblement acceptée des catholiques, irrita tout à fait les orthodoxes, dont elle nivelait d’anciens privilèges. Ce fut une des causes — peut-être un des prétextes — qu’invoqua en Croatie le parti serbe pour susciter un nouveau schisme national. Mazuranic n’était pas homme à garder le pouvoir contre le gré d’une partie de ses concitoyens. Il le quitta comme il l’avait pris et comme il l’avait exercé, en esprit supérieur et amoureux surtout de l’intimité des lettres.
Sa démission remonte à 1879. Ce fut un malheur d’autant plus grand pour le pays que le parti national n’était guère en état de lui trouver un successeur. Les Hongrois en profitèrent pour confier les fonctions de ban à une de leurs créatures, le comte Pejacevic, puis à Hédervary. De cette époque date ce que les Croates appellent la période de magyarisation, qu’on pourrait caractériser : la conquête du pays par le pays, à l’instigation et au profit d’une race étrangère.
La nation magyare subit, plus rigoureusement qu’une autre, peut-être, la loi de la lutte pour la vie. Il faut le dire à sa décharge et ne pas requérir, sans réserves, contre son tempérament. Dans un siècle où le sentiment de la race se réveille et s’attribue une part prépondérante à la formation ou à la réforme des corps politiques, la situation des Magyars est particulièrement périlleuse. Ils ne se rattachent à aucune des grandes familles européennes. Il ne leur est pas donné de prononcer ce mot, qui, à lui seul, est une douceur pour les peuples isolés : frères de race, ou, s’ils le prononcent, on les renvoie aux Mongols. Les tassemens constitutifs de la nouvelle Europe s’opèrent autour de leur petit groupe, en vertu d’une loi naturelle contre laquelle ils se sentent contraints de réagir, sous peine d’être réduits à un rôle nul, sinon à une sécurité douteuse. De là le caractère artificiel et inquiet de leur politique. Il y a quelque chose de défensif dans leur plan d’assimilation acharnée. Leur bloc ethnique ne peut être soutenu que par l’alluvion.
Leur politique, vis-à-vis des Slaves du Sud, — comme vis-à-vis des Slovaques et des Roumains, du reste, — n’est que le développement de cet esprit de conservation égoïste et militant. Les froissemens qu’ils indigent à cette nation, que le dualisme leur a livrée, ne sont pas le pur effet d’une haine de race, qui agirait sans but et uniquement pour s’assouvir. Ils n’ont point