débarrasser dans la boucle du Niger, c’est Samory. Nous avons commis une lourde faute en usant à son endroit de demi-mesures et en laissant croître son ascendant ; on eût épargné bien des hommes et beaucoup d’argent en lui portant plus tôt un coup décisif. Il faudra bien en venir à cette résolution définitive ; on l’aura rendue plus coûteuse en la différant.
Parmi les huit millions et quelques centaines de mille kilomètres carrés que les écrivains coloniaux assignent à nos possessions extérieures, un des morceaux les mieux configurés et qui peuvent le plus aisément, non certes sans beaucoup de temps, recevoir l’empreinte de notre civilisation, c’est Madagascar ; elle entre pour près du dixième dans l’étendue totale de nos dépendances et se trouve à elle seule égaler en territoire la mère patrie. Objet de tentatives multipliées d’établissement et d’aventures, de la part de nos gouvernemens et de nos compatriotes depuis plus de deux siècles et demi, Madagascar vient enfin de tomber dans nos mains. Nous n’en occupons pas seulement quelques baies ou quelques côtes qui sont marécageuses et, en l’état actuel, insalubres. Nous en détenons le noyau qui est sain. Madagascar offre bien des avantages pour la colonisation ; d’abord c’est une île, ce qui est inappréciable ; on n’aura pas ainsi à lutter sans cesse contre de nouveaux groupes de populations instables ; on possède un territoire défini et circonscrit. Les communications par mer entre les différens ports permettront, au moins pendant un assez long temps, de se passer de voies de communication artificielles, toujours très coûteuses. Il suffira de relier Tananarive, par un chemin de fer à voie étroite, soit à Tamatave ou à tout autre port de la côte orientale, soit à Majunka. Les côtes, il est vrai, de la grande île malgache sont insalubres ; mais presque tout le littoral français de la Méditerranée l’est également., ou le fut autrefois, avant que des soins intelligens et le progrès des cultures n’aient atténué cet inconvénient. L’insalubrité bien connue de la vieille cité d’Aigues-Mortes, par exemple, ne l’empêche pas d’être le centre d’un des plus beaux vignobles du monde. Insalubre aussi est la côte africaine opposée à Madagascar, la célèbre Delagoa Bay, qui ne s’annonce pas moins comme devant être à bref délai un des points commerciaux les plus importans du globe. Comme il ne peut s’agir pour la France d’une colonie de peuplement, le mouvement intérieur de notre population ne se prêtant pas à ce genre de colonies, cette insalubrité, à supposer qu’elle persiste,