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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 132.djvu/424

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lieux boisés. On dépose sur un point déterminé, après avoir au préalable, et s’il y a lieu, enlevé les chaumes, un amas de feuilles sèches, bois et broussailles. Un certain nombre de personnes, munies de branches de laurier-rose, s’il est possible, forment sur une certaine étendue le cercle et dirigent les criquets sur cet amas ; puis on y met le feu. Ceux de ces insectes qui s’échappent peuvent être aisément ramenés sur le foyer, et par cette méthode on obtient de très bons résultats.

M. Durand, vétérinaire militaire, directeur de la bergerie de Ben-Chicao, proposa à son tour un appareil établi sur le principe de celui qu’on emploie dans l’île de Chypre ; cet appareil breveté parut au début, aux yeux de la commission chargée de rechercher les moyens de prévenir les irruptions des sauterelles, réunir toutes les qualités désirables de légèreté, de facilité de maniement, et enfin d’efficacité ; il en fut fait quelque usage, mais son prix élevé, son peu de solidité, et, paraît-il, sa complexité le firent abandonner. L’appareil cypriote, dont la fabrication était libre, ce qui permettait d’avoir recours pour la fourniture aux adjudications, et qui avait fait ses preuves dans l’île de Chypre, offrait de tels avantages qu’il fut définitivement adopté à partir des années 1888 et 1889.

Mais avant de décrire le procédé qui allait rendre en Algérie les mêmes services qu’il avait rendus dans son pays d’origine, disons dans quelles conditions doivent être les sauterelles, pour qu’il puisse fonctionner avec utilité.

La sauterelle ailée, forme sous laquelle l’insecte apparaît d’abord, est d’une destruction très difficile, grâce à son vol rapide et puissant qui lui permet d’échapper à tous les efforts. Il y a cependant deux états pendant lesquels chacun peut en détruire des quantités relativement appréciables. C’est d’abord pendant les premiers momens du jour, où la fraîcheur et la rosée les maintiennent dans un état d’engourdissement complet ; c’est ensuite l’époque de l’accouplement où l’insecte se soustrait difficilement aux attaques dont il est l’objet. Dans ces deux états l’emploi de branchages, de verges, de balais en fil de fer peut avoir une efficacité relative ; mais en dehors de ces deux états, tous les moyens employés dans cette période ne peuvent avoir d’autre résultat que de rejeter les sauterelles d’un point menacé sur un autre point qui ne l’est pas. D’ailleurs, il est acquis que l’insecte en question, arrivé à son développement complet, ne mange que dans l’intervalle de chaque ponte et cause relativement moins de ravages que les jeunes criquets.

La phase qui suit est celle de la ponte, où les efforts, — bien que l’on ne puisse s’en dispenser, — sont peut-être encore plus