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La Tunisie construit actuellement un nouveau réseau assez étendu, mais au moyen de ses propres ressources, et sans faire appel au concours de la France.


En dehors de l’Algérie et de la Tunisie, deux entreprises coloniales donnent lieu à des garanties de l’Etat. L’une est celle du chemin de fer (126 kilomètres) et du port de la Réunion, qui ont été construits par une compagnie aujourd’hui en faillite et déchue de sa concession. Le gouvernement a repris l’exploitation, qui couvre à peu près ses frais, et il paye directement aux obligataires l’intérêt garanti, deux millions et demi par an. La part afférente au chemin de fer entre dans cette somme pour un peu moins de la moitié.

L’autre entreprise est celle du chemin de fer de Dakar à Saint-Louis, long de 264 kilomètres, pour lequel l’Etat a fourni une subvention de douze millions et demi, représentant les trois quarts de la dépense d’établissement prévue, et garantit l’intérêt à 6 pour 100 du dernier quart ; cette ligne, médiocrement établie, est très loin de couvrir ses frais d’exploitation et d’entretien.

Le chemin de fer du Soudan, de Kayes à Bafoulabé, a été établi directement par les agens de l’Etat, qui l’exploitent aujourd’hui sur une longueur de 130 kilomètres.

Le chemin de fer de Saigon à Mytho et celui de Langson ressortissent exclusivement au budget de l’Indo-Chine et ne rentrent, par suite, pas dans notre sujet.


Nous avons achevé l’ingrate analyse qui était nécessaire pour faire comprendre l’origine et la raison d’être des charges considérables que les chemins de fer imposent à notre budget. L’enchevêtrement d’intérêts qui existe aujourd’hui entre l’Etat et les compagnies s’explique, on le voit, non par un dessein mûri, mais par l’entrainement des circonstances. Une fois engagé dans la garantie, l’Etat était nécessairement amené à lui donner les extensions qu’elle a reçues, ou à procéder au rachat général. Il faut ajouter que, tant qu’il ne renonçait pas absolument au concours des compagnies, toute mesure de nature à consolider le crédit des obligations lui était au fond avantageuse, puisque, en diminuant les intérêts des nouveaux emprunts, elle atténuait d’autant les charges en raison desquelles son concours était nécessaire.

A deux reprises, l’Etat s’est imposé, pour les compagnies, des sacrifices qui n’étaient pas le prix de services nouveaux : la première fois, en 1859, quand il a, par la garantie, consolidé le crédit