maltraité. On railla — bien lourdement d’ailleurs — son universalité ; on attaqua son administration ; on alla plus loin : on pénétra dans son intimité, « Mamsell Vulpius » ne fut point épargnée, et prononça des sentences de cette force :
Auparavant, j’étais une vierge, à présent je suis une…
Mais le monde bienveillant m’appelle toujours mamselle.
Les « Dioscures », qui avaient lancé leurs flèches avec de beaux gestes de demi-dieux, sentirent les coups. Toutefois, ayant sur leurs adversaires la supériorité du talent, — car parmi ceux qu’ils avaient visés les meilleurs ne répondirent pas, — ils purent se consoler par le mépris. Ce ne fut pas sans saigner sous les traits grossiers : « J’avais déjà lu la sale production qu’on a publiée contre nous, écrit Schiller à son ami, le 6 décembre 1796, dont l’auteur, à ce qu’on m’affirme, est M. Dyck, de Leipzig. Quoique les ressentimens de certaines gens ne puissent se manifester d’une manière plus noble, ce n’est que dans notre Allemagne que le mauvais vouloir et la grossièreté peuvent se permettre de pareilles sorties contre des auteurs respectés ; partout ailleurs, j’en suis convaincu, un écrivain qui se conduirait ainsi perdrait à jamais l’estime et la confiance du public. Puisque la honte ne peut rien sur des pécheurs comme ceux-là, on devrait au moins pouvoir les contenir par la peur ; mais chez nous la police est en aussi mauvais état que le goût littéraire. » Après quoi, pris peut-être d’un doute sur leurs propres procédés, l’honnête poète ajoutait : « Ce qu’il y a de désagréable en cette affaire, c’est que les gens modérés, loin de prendre nos Xénies sous leur protection, diront d’un air de triomphe que, puisque nous avons commencé l’attaque, le scandale retombe sur nous, » J’imagine qu’il pesa un moment ce scrupule, et finit par rassurer sa conscience en comparant la modération de l’attaque aux violences personnelles et grossières des réponses ; car il conclut : « En tout cas, les distiques de nos adversaires sont une brillante justification des nôtres, et il n’y a pas de remède pour ceux qui ne voient pas encore que nos Xénies sont une production vraiment poétique. Il était impossible de séparer plus nettement qu’on ne l’a fait ici la grossièreté et l’insulte de l’esprit et de la gaîté. » Ce qu’il y a de fâcheux dans cette passe d’armes, c’est qu’elle a pu tromper les contemporains, comme elle trompe encore quelquefois la critique sur l’amitié des deux poètes : elle en accentue le