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par choix et prédilection, on en vienne à les peindre uniquement; qu’on leur témoigne un respect, qui éclate dans cette impuissance même à peindre autre chose qu’eux et dans la description extatique des futilités dont ils vivent (respect incurable qu’essayent en vain de démentir d’éloquentes et soudaines sévérités de moraliste); et que, au bout du compte, on ne trouve d’intéressant, ici-bas, que les riches, c’est ce que nous supportons avec peine, et c’est en cela, justement, que consiste le snobisme du romancier Jacques Dangy. Et il est vrai que Dangy est un personnage de fiction.

L’histoire de ce personnage est d’ailleurs extrêmement simple, ce qui est bien; et se passe presque entièrement dans les entr’ actes, ce qui est commode.

Premier tableau. — « Cinq à sept » chez les Dangy. Papotages, « snoberies » et « rosseries ». (Quelle belle langue nous parlons!) Mais voici entrer la plus belle « relation » de Jacques Dangy : le duc et la duchesse de Talmont. Nous apprenons que Jacques fait sa cour à la duchesse parce qu’elle est duchesse, et le duc à la petite Mme Dangy (Hélène) parce qu’elle est gentille.

Deuxième tableau. — Le duc et Mme Dangy répètent ensemble une comédie de salon. Le duc, distingué et glacé, mais adroit, en profite pour pousser plus vivement sa pointe avec des phrases empruntées aux romans du mari, ce qui est charmant. Là-dessus, Mme Dangy, bonne petite femme, ancienne compagne des jours modestes, demeurée grisette dans son fond, dit à Jacques : « Paris nous est mauvais. Allons-nous-en à la campagne... à Robinson, par exemple. — Enfant! dit Jacques. Je suis sûr de toi, et d’ailleurs je ne suis pas fâché qu’un duc t’ait remarquée, car cela me pose. Quant à la duchesse... sois tranquille. En flirtant avec elle, je travaille de mon état, qui est celui de psychologue élégant. Je prends des notes sur elle pour mon prochain livre. » Mais Hélène insiste si gentiment, si tendrement, que Jacques finit par céder. Le malheur, c’est que, Hélène sortie pour faire ses malles, la duchesse vient trouver Dangy et, le sentant qui lui échappe, lui promet un rendez-vous pour le lendemain. Dès lors, plus de Robinson. « Tu comprends, dit Jacques à sa femme quand elle rentre avec son chapeau, je me dois à Paris, à la grande vie. — C’est comme cela! dit Hélène; eh bien, moi aussi je vais la mener, la grande vie ! »

Troisième tableau. — Soirée littéraire et musicale chez les Dangy, d’un comique vaudevillesque : mais peut-être, ici, le vaudevillesque est-il le vrai. Des choses considérables se sont passées dans l’entr’acte.