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Mais les uns et les autres, il faut bien le dire, profitent surtout de la vitesse acquise, et il est permis de se demander comment fera la génération à venir, moins sobre, plus exigeante sous le rapport du bien-être légitime et du plaisir, si les conditions actuelles venaient à empirer, ou même à ne pas s’améliorer.

Mais gardons-nous de conclure par des phrases de découragement ou de plainte. Le passé fut prospère; l’avenir peut l’être encore. Après tout, l’abandon de la culture des terres médiocres, se généralisant, présenterait moins d’inconvéniens que d’avantages si ces biens délaissés étaient graduellement reboisés ; les lots inférieurs du second ou du premier ordre, continuant à être exploités et largement fumés, seraient mieux soignés par des cultivateurs peu nombreux, mais aisés, moins attachés à la terre et aux traditions, mais plus débrouillés. Il est probable que bien des cultures antiques disparaîtront pour toujours; d’autres se maintiendront, et d’autres enfin, les plus rémunératrices, se développeront exclusivement. Il faudra se résigner à voir le patois disparaître devant les progrès du français, et cette évolution, une fois parfaite, présentera quelques avantages. Ils compenseront les ridicules qui offensent dans le langage actuel; ce n’est plus la vieille langue populaire, et il diffère encore beaucoup du parler national. Jusqu’ici le voisinage de Marseille a fait plutôt du tort à notre région : dans quelques années, les communications devenant de plus en plus rapides et faciles, le même terroir pourra bénéficier des avantages de la proximité d’une des villes les plus actives de l’Europe.


ANTOINE DE SAPORTA.