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microscopes qui mesurent avec exactitude le millième de millimètre. En ce qui concerne le fer, un jeune savant, M. Lapicque, a précisément imaginé une méthode d’analyse de ce genre qui s’adapte parfaitement aux exigences de la physiologie et qui a déjà permis de réviser beaucoup des déterminations incertaines obtenues par les anciens procédés.


Le rôle fondamental du fer dans les organismes, ce que l’on pourrait appeler sa fonction biologique, tient à la propriété chimique qu’il possède de favoriser les combustions, d’être un agent d’oxydation pour les matières organiques.

La chimie des corps vivans se distingue de la chimie de laboratoire par un trait qui lui est propre et qui consiste, au lieu d’opérer ses réactions d’une manière directe, à user d’agens spéciaux. Elle emploie des intermédiaires qui, sans être tout à fait inconnus de la chimie minérale, y sont pourtant d’une intervention plus rare. S’agit-il, par exemple, de fixer une molécule d’eau sur l’amidon pour en faire du sucre, le chimiste réalisera cette opération en chauffant l’amidon en présence d’une eau acidulée. L’organisme, qui accomplit couramment cette opération, — on peut dire à chacun des repas, — procède autrement, sans chaleur et sans acide. C’est un ferment soluble, une diastase, un enzyme (pour lui donner ses divers noms) qui lui sert d’agent d’exécution et produit le même résultat. À considérer le point de départ et le terme, les deux opérations sont identiques : l’agent spécial n’a rien cédé de sa substance ; il s’efface après avoir accompli son œuvre ; et celle-ci n’en conserve pas la trace. C’est là, dans le mécanisme d’action de ces fermens solubles, que réside tout le mystère, encore entier, de la chimie vivante. On conçoit que ces agens qui ne laissent rien de leur substance dans leurs opérations, qui ne subissent pas d’usure, n’aient pas besoin d’être représentés par des quantités considérables ; quelle que soit l’étendue de leur besogne, il suffit qu’ils disposent du temps pour la mener à bien. Et c’est là en effet le caractère le plus remarquable des fermens solubles : la grandeur de l’action opposée à l’infime proportion de l’agent avec la nécessité du temps pour l’accomplissement de l’opération.

Le fer se comporte précisément de la même manière dans la combustion des matières organiques. Celles-ci, aux températures ordinaires, sont incapables de fixer directement l’oxygène : elles