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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 145.djvu/778

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Morny, Fould, Rouher, Magne, protestèrent par leur démission. Alors, pour la première fois, Persigny entra aux affaires, à l’Intérieur, bien qu’il eût convoité les Allaires étrangères, qu’on laissa à Turgot, Abbatucci, un ami fidèle du Prince, prit la Justice, Bineau, les Finances (22 janvier). Deux nouveaux ministères furent créés par réminiscence de l’Empire : le ministère d’Etat et le ministère de la Police.


III

Persigny inaugura son ministère par la rédaction des décrets réglementaires sur les élections et sur la presse.

Le décret électoral (2 février 1852) reproduisit les principales dispositions de la loi républicaine du 15 mars 1849, mais il en altéra inconsidérément une des meilleures. Conformément à l’usage anglais, la loi de 1840 n’admettait pas les scrutins de ballottage, qui prolongent l’agitation électorale et facilitent les coalitions subversives. L’élection se terminait au premier tour à la pluralité des voix, c’est-à-dire à la majorité relative, pourvu qu’un huitième des électeurs inscrits eût pris part au scrutin (Art. 63). Le décret exigea la majorité absolue. Si aucun des candidats ne l’a obtenue, l’élection est recommencée le deuxième dimanche qui suit la proclamation des résultats (Art. 36). On accordait ainsi aux deux minorités vaincues au premier tour le temps de se concerter pour devenir majorité au second, dans lequel, on se contentera, pour mieux faciliter la manœuvre, de la majorité relative. On autorisa également les candidatures multiples. Aucun gouvernement n’avait ainsi fabriqué contre lui-même une aussi sûre machine de destruction.

Le scrutin à majorité relative a produit l’assemblée conservatrice de 1849. Des scrutins de ballottage, rétablis en 1852, sont sortis les irréconciliables de la coalition républico-orléaniste de la fin de l’Empire. Des scrutins à majorité relative, rétablis par le gouvernement de la Défense nationale en 1871, est issue de nouveau une assemblée conservatrice. Les scrutins de ballottage, imprudemment rétablis par l’assemblée conservatrice de 1871, ont amené en 1885 une défaite des conservateurs, dont le scrutin à majorité relative eût fait une victoire.

L’inventeur des scrutins de ballottage, convaincu de son erreur, écrivait à l’Empereur, le 27 juin 1869 : « Il faudra