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Il a fallu que les industriels allemands fussent d’excellens commerçans pour obtenir de pareils résultats. L’avance conquise par eux sur le terrain des produits ordinaires, de consommation courante, est énorme. Sur celui des produits spéciaux de qualité supérieure, du matériel militaire, des plaques de blindage, des constructions métalliques, notre industrie française reste à la hauteur de ses concurrens et souvent même les dépasse : à tout instant le Creuset, Châtillon-Commentry, les Forges et aciéries de la Marine, la Société des Batignolles, Fives-Lille, reçoivent de l’étranger des commandes qui attestent l’excellence de leur fabrication et leur compétence technique. Hier encore, la Société des Batignolles était chargée de construire à Saint-Pétersbourg le pont Troitsky, dont la première pierre fut posée en août 1897 par le tsar Nicolas II et le président Faure. Ici donc, nous soutenons la lutte, non sans avantage. Il dépendrait de notre énergie d’arriver ailleurs au même succès.

L’industrie sidérurgique est en ce moment très active en Allemagne. Elle reçoit, en particulier, des commandes nombreuses pour les chemins de fer économiques, les ponts et les fabriques de machines : parmi ces dernières, celles qui construisent des appareils électriques sont spécialement occupées. Il est vrai que certaines fabrications, comme celle des tuyaux, ont pris un tel développement qu’elles n’ont pas encore trouvé de débouchés pour la totalité de leur production. D’autre part, les fabriques moyennes achètent aujourd’hui leur fer, leur acier, leurs produits demi-fabriques à des prix si élevés qu’elles ont beaucoup de peine à travailler avec bénéfice. On cherche un remède à cette situation dans des accords, dont le but est à la fois de s’entendre sur les prix, de régulariser la production et de répartir entre tous les industriels, petits et grands, les commandes pour l’exportation. On va jusqu’à songer à cet effet à la constitution d’une Union de tous les producteurs de fer et d’acier (Exportvereinigung aller Eisen und Stahlwerke) qui demande aux producteurs de charbon et de minerai de leur donner son appui, en faisant des conditions plus défavorables à ceux des fabricans qui refuseraient d’entrer dans le syndicat.

L’Allemagne, en 1896, a exporté 1 700 000 tonnes de fer, soit l’équivalent de la production totale française en fer et en acier. Sa production houillère est énorme : elle est réglementée par régions. Ainsi, dans le bassin de la Ruhr, seize compagnies