conviction que, pour une jeune fille de la petite bourgeoisie qui veut gagner son pain, à moins qu’elle ne soit remarquablement bien douée (et encore ! ), mieux vaut courir la carrière d’institutrice privée.
Ce n’est point ici le lieu de faire le roman de l’institutrice ni de parler des tristesses de la situation, nécessairement un peu subalterne, à laquelle elle est condamnée, des dangers auxquels, pour peu qu’elle soit jolie, sa jeunesse est parfois exposée. Plaçons-nous à un point de vue beaucoup plus matériel et positif : celui de la carrière et du gagne-pain. Comment une jeune fille de la petite bourgeoisie devient-elle institutrice ? Que gagne-t-elle ? Si ce gain vient à lui manquer, que devient-elle ? Essayons de le rechercher.
Elle devient institutrice, par les recommandations, par les amies qui parlent d’elle à une amie plus riche. Elle peut le devenir aussi par l’intermédiaire d’un couvent, si elle y a fait son éducation, les religieuses plaçant volontiers ainsi leurs anciennes élèves. Enfin, elle peut s’adresser à un bureau de placement.
Il y a dans Paris quatre bureaux qui ont la spécialité de placer des institutrices. J’ai visité l’un de ces bureaux. L’aspect m’en a paru convenable, la directrice aussi. Le matin, elle reçoit les domestiques, femmes de chambre, bonnes d’enfant, etc. L’après-midi est consacrée aux institutrices, pour ne pas les humilier par le contact. D’après les renseignemens qui m’ont été fournis, la demande d’institutrices tendrait à baisser pour la France, à cause du grand nombre de cours publics ou privés que, depuis quelques années, on a ouvert pour les femmes. Ces cours, auxquels une bonne peut conduire, suffisent pour l’enseignement. La mère garde la charge de l’éducation, et, en soi, cela n’est peut-être pas un mal. Il n’en serait pas de même pour l’étranger. De même qu’en France on recherche beaucoup les institutrices anglaises ou allemandes, de même en Angleterre, en Allemagne, en Russie surtout, on recherche beaucoup les institutrices françaises. Certaines agences de placement à l’étranger écrivent pour en demander, et on leur expédie celles qui veulent s’expatrier, comme, une marchandise d’exportation. Mais il n’est guère prudent de partir sur la simple assurance de ces agences étrangères, et il est préférable de traiter, par l’intermédiaire du bureau de Paris, avec les familles elles-mêmes. La commission que ce bureau prélève est de cinq pour cent du traitement de la première année. Des