Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 147.djvu/957

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

siège épiscopal en pareille occurrence. Léon XIII, dans une lettre adressée à l’archevêque, lui a exprimé à son tour le regret de son absence dans un moment où sa présence aurait été si convenable ; mais, en même temps, le Saint-Père se trouvait obligé de prendre la défense du clergé en général et des intérêts religieux dont il a la garde, car ces intérêts étaient menacés.

Ils l’étaient, tout d’abord, par les projets de M. Zanardelli. M. Zanardelli demandait le retrait de l’exequatur accordé à Mgr  Ferrari, ce qui ne pouvait avoir lieu qu’en vertu d’une loi nouvelle. Il exigeait que le gouvernement présentât une mesure qui aurait apporté une perturbation profonde dans le système de la loi des Garanties. On comprend que M. di Rudini ait reculé devant cette politique : elle aurait conduit à la guerre ouverte contre le Vatican, et nul ne peut savoir ce qui en serait sorti dans les circonstances actuelles. En tout cas, une telle entreprise aurait ajouté aux difficultés que traverse l’Italie, au lieu d’en retrancher ou d’en diminuer quoi que ce soit. Si le pouvoir civil, après leur avoir accordé l’exequatur, pouvait le retirer aux évêques, ceux-ci cesseraient en fait d’être inamovibles. Ils cesseraient de l’être du moins aux yeux du roi, mais non pas aux yeux du Pape, et de là naîtraient les conflits les plus redoutables. M. Zanardelli estime sans doute que, dans l’état d’incertitude où elle est aujourd’hui, l’opinion a besoin d’être remontée et qu’elle ne peut l’être que par la fièvre des passions les plus ardentes. Ce serait jouer un jeu bien dangereux. En revanche, M. Visconti-Venosta estime qu’il faut tourner et diriger la guerre contre les associations démocratiques, et restreindre toutes les libertés. De ce côté, il y aurait un autre péril. Si l’on se contente de regarder ce qui se passe et d’observer comment l’état de siège est appliqué par les autorités militaires, il semble que M. di Rudini s’applique, sans le dire, à donner satisfaction à l’un et à l’autre. En quelques jours, on a supprimé un grand nombre de journaux de toutes les couleurs, et un nombre encore plus considérable d’associations démocratiques ou religieuses, autant des unes que des autres : le parallélisme a été parfait. De toutes ces suppressions, la plus importante et la plus significative est celle que le général Bava-Beccaris a prononcée contre le Comité diocésain de Milan. Le coup a été extrêmement sensible ; il a été aggravé par les considérans dont le général s’est plu à l’accompagner. « Considérant, dit-il, que toute association qui, fondée sur un lien commun de religion et de foi, sort de ce champ d’action et prétend régler la conduite des citoyens dans leurs rapports avec l’État et tes institutions, ne peut que devenir dangereuse pour