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Les astronomes français, qui à la réunion de Washington ont dû se séparer de leurs collègues sur des points plus importans, n’ont pas fait d’opposition à celui-ci. M. Janssen y a adhéré. Le Bureau des longitudes, par l’organe de M. H. Poincaré, s’est déclaré favorable à cette unification du jour astronomique et du jour civil, sous la condition que les gouvernemens qui publient les principales éphémérides prendraient les mesures nécessaires pour que la réforme fût appliquée partout simultanément, et sous cette autre condition encore, que l’heure civile, comme l’heure astronomique, fût comptée de 0 à 24. Ce sera sans doute renoncer à une tradition de l’astronomie depuis Ptolémée ; mais d’autre part, ce sera revenir à la notation d’Hipparque, dans l’antiquité, et de Copernic dans les temps modernes.

Le point important n’est pas, en effet, de partir de tel moment ou de tel autre, c’est pour les astronomes de conserver l’unité du nyctémère qui est le véritable étalon de mesure, c’est-à-dire de décomposer le jour en 24 heures consécutives au lieu de le couper en groupes de douze heures. Ce fractionnement en deux douzaines pouvait avoir sa raison d’être, lorsque chacune d’elles se distinguait de l’autre par un caractère aussi tranché que celui d’être éclairée ou obscure. Mais puisqu’il a fallu renoncer à faire coïncider les périodes de douze heures avec les périodes de jour et de nuit véritables, il eût été logique en abandonnant cette chimère d’abandonner du même coup la manière de compter qui en était l’expression. La numération par 24 heures s’imposait donc.

De fait, elle a été en usage dans divers pays, comme nous l’avons vu à propos de l’Italie. Si on l’a abandonnée, ce n’est point à raison d’inconvéniens qui lui seraient particuliers. Le public a sans doute plus de peine à embrasser une série de vingt-quatre parties et à en saisir la succession que s’il s’agit seulement d’une douzaine. Mais cette légère infériorité est compensée par des avantages nombreux, dont le plus évident est de rendre impossible toute confusion entre les heures du jour et celles de la nuit. L’adoption de cette notation constituerait un progrès très appréciable au point de vue de la clarté, de la simplicité et de la commodité de toutes les indications chronologiques. La confection des horaires, indicateurs, annuaires de toute espèce en serait singulièrement facilitée ; et leur lecture cesserait d’être l’opération laborieuse et fertile en erreurs qu’elle est aujourd’hui.