pas cesser même après qu’il n’y a plus de combattans ; qu’elle s’imagine que tout l’objet et que tout l’art en est de défendre ce que personne n’attaque, afin d’éviter qu’on attaque ce qu’elle tient par-dessus tout à défendre. — Et si quelque esprit, plus curieux ou plus philosophique, se met en peine de chercher le fondement de cette doctrine, dont l’ordre du jour du 14 juin a été l’expression parlementaire, craignons qu’il n’en établisse assez vite la filiation ou le rapport étroit avec ce que l’on nomme, dans le langage vulgaire, « la politique de l’assiette au beurre ».
Aussi bien nous assistons, depuis tantôt une quinzaine, à un édifiant spectacle. Comme il le devait, M. le Président de la République a remercié le ministère Méline de l’excellent exemple qu’il venait de donner en durant plus de deux années ; et il n’est pas de Français, s’il n’est aveuglé par une haine sectaire, qui ne lui en soit reconnaissant, encore que, dans les derniers temps, en particulier dans les derniers mois, et tout spécialement le dernier jour, il ait hésité, faibli, se soit presque excusé, et que M. Méline ne soit pas absolument innocent de sa propre chute. Les adieux reçus, les politesses échangées, M. Félix Faure, ayant appelé à son aide, suivant l’usage, MM. Loubetet Deschanel, a réfléchi sur l’énigme que la Chambre proposait à sa sagacité constitutionnelle. D’abord il lui a paru évident que l’homme désigné était M. Ribot, premier signataire de l’ordre du jour de confiance-défiance accepté et rejeté par M. Méline. M. Ribot a consenti à se charger de consultations préparatoires ; en aucune crise ministérielle on ne s’était autant consulté, et aucune, non plus, n’avait été si obscure et si longue. Trois matinées et trois après-midi, on vit passer M. Charles-Dupuy, M. Poincaré, M. Sarrien, M. Delombre, M. G. Leygues, qui allaient chez M. Ribot. On ne concentrait pas, on conciliait ; sur les principes, chacun abandonnant les siens, l’entente avait été aisée ; mais, sur la quantité et sur la qualité des portefeuilles, la fermeté du caractère avait reconquis ses droits : M. Ribot se heurtait à des héroïsmes. Il ne put qu’avouer sa défaite ; ce ne serait pas lui qui concilierait.
Mais ce serait peut-être M. Sarrien. Si les progressistes ne triomphaient pas des exigences radicales, peut-être les modérés seraient-ils moins difficiles : il n’y avait qu’à reprendre à l’envers la même opération. Et l’on vit repasser M. Charles-Dupuy et M. Leygues, qui allaient chez M. Sarrien ; M. Sarrien, qui se rendait chez M. Léon Bourgeois ; M. Poincaré qui retournait chez M. Ribot. Le programme radical, — qui l’ignore ? — est comme un temple assis sur deux colonnes : la révision