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de Baring un bataillon de la Légion germanique. Les Allemands descendirent à la gauche de la grande route, reprirent le potager et, passant à l’ouest de la ferme, s’avancèrent vers le verger. A ce moment, ils furent chargés par les cuirassiers du général Dubois, que l’Empereur avait détachés du corps de Milhaud pour seconder l’attaque de l’infanterie. Les cuirassiers leur passèrent sur le ventre et, du même élan, vinrent sabrer au bord du plateau les tirailleurs de la brigade Kielmansegge.

A l’est de la route, les autres colonnes de d’Erlon avaient gravi les pentes sous le feu des batteries, les balles du 95e anglais et la fusillade de la brigade Bylandt, déployée en avant du chemin d’Ohain. La charge bat, le pas se précipite malgré les hauts seigles qui embarrassent la marche et les terres détrempées et glissantes où l’on enfonce et où l’on trébuche. Les : Vive l’Empereur ! couvrent par instans le bruit des détonations. La brigade Bourgeois (échelon de gauche) replie les tirailleurs, assaille la sablonnière, en déloge le 95e, le rejette sur le plateau, au delà des haies, qu’elle atteint en le poursuivant. La division Donzelot (deuxième échelon) s’engage avec la droite de Bylandt, tandis que la division Marcognet (troisième échelon) s’avance vers la gauche de cette brigade. Les Hollando-Belges lâchent pied, repassent en désordre les haies du chemin d’Ohain et, dans leur fuite, rompent les rangs du 28e anglais. De son côté, Durutte, qui commande le quatrième échelon, a débusqué de la ferme de Papelotte les compagnies légères de Nassau ; il est déjà à mi-côte, menaçant les Hanovriens de Best.

Dans l’état-major impérial, on jugeait que « tout allait à merveille. » En effet, si l’ennemi conservait ses postes avancés de Hougoumont et de la Haie-Sainte, ces postes étaient débordés, cernés, et tout le centre gauche de sa ligne de bataille se trouvait très menacé. Les cuirassiers de Dubois et les tirailleurs de d’Erlon semblaient couronner le plateau, le gros de l’infanterie les suivait de très près. Que ces troupes fissent encore quelques pas, qu’elles se maintinssent sur ces positions le temps de lancer la cavalerie de réserve « pour donner le coup de massue, » et la victoire paraissait certaine.


VIII

La vicieuse ordonnance des colonnes de d’Erlon, qui déjà avait alourdi leur marche et doublé leurs pertes dans l’ascension du