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reprenaient en même temps ; de 1883 à 1889, la consommation annuelle de fer aux États-Unis doubla.

La disparition rapide des titres rachetables de la dette publique faisait que le gouvernement ne savait plus comment employer le surplus de ses ressources et était contraint de détenir dans ses caisses des instrumens de circulation dont l’absence gênait le marché. La préoccupation dominante était celle de savoir quel usage serait fait des excédens budgétaires. Un volume, publié en 1888 : « Revenus nationaux », contient une série d’avis donnés à cet égard par les principaux économistes et professeurs. Les titres de ces essais en indiquent l’esprit : « Politique des excédens (Surplus financiering). » — « Faut-il conserver le revenu intérieur ? » — « Défense de la politique protectionniste. » — « Réorganisation des revenus. » — « Les subventions aux compagnies de bateaux à vapeur considérées comme un moyen de réduire l’excédent. » — « Projet de réduction du tarif. » Le travail du professeur Edwin Seligman commence ainsi : « Le grand danger qui menace l’équilibre financier, et par suite la prospérité commerciale du pays, est l’existence d’un excédent. Il n’est pas de mots assez forts pour en dépeindre les effets démoralisans, non plus que les doctrines anti-scientifiques dont il est le résultat. » Heureux pays que celui où le souci des hommes d’État consiste à se défendre contre un excès de richesse !

Une situation semblable s’était déjà produite de 1834 à 1836, alors que l’ancienne dette avait été entièrement remboursée. On essaya d’appauvrir le budget en diminuant les recettes et en majorant les dépenses. Le droit sur le sucre, qui rapportait 56 millions en 1889, fut supprimé ; les pensions militaires, augmentées d’une somme considérable ; les fonctionnaires et les membres du Parlement pensaient servir l’intérêt public en cherchant tous les moyens de dépenser davantage. « Vive l’excédent ! (God help the surplus !) » s’écriait un commissaire des pensions, le jour de son entrée en fonctions, sous la présidence Harrisson. Cet excédent, proie désignée à tous les appétits, n’était pas destiné à durer longtemps. Le gouvernement arrêta ses rachats de titres ; il cessa même de se conformer à la loi exigeant le remboursement annuel d’une somme égale à 1 pour 100 de la dette totale des États-Unis. Le Trésor se trouva en déficit, pour la première fois depuis de longues années, dans le dernier trimestre de l’année fiscale 1890-91 ; ce déficit se renouvela dans deux trimestres