Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/410

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la même administration, sous les auspices de M. Cambon, gouverneur général, publiaient récemment un gros travail qui complète sur quelques points et met pour ainsi dire à jour le remarquable travail de leur devancier[1]. Les auteurs de ce nouvel ouvrage sur les confréries religieuses musulmanes ont remonté jusqu’aux origines lointaines de l’islamisme et du peuple arabe lui-même. Le Prophète, le Coran, les traditions, les écoles théologiques, les sectes ont été de leur part l’objet de recherches ardues et patientes. Ils ont étudié le soufisme dans ses multiples manifestations en Orient et en Occident ; et l’histoire des confréries, leur organisation administrative et financière, leur rôle politique, leur statistique n’ont guère de secrets pour eux. C’est dire qu’avec ce livre, joint à celui de M. Rinn, nous savons maintenant tout ce qu’il nous importe de savoir sur ce grave sujet.

Ce que nous disions au sujet de l’attitude que la France doit prendre vis-à-vis des confréries religieuses au Maroc, les auteurs de la récente publication le disent aussi pour ce qui concerne l’Algérie. Mais ici nous avons des devoirs plus compliqués et plus incessans, nous pouvons exercer une surveillance et une action plus directe ; ici nous devons être davantage les maîtres. M. Rinn, à la fin de son ouvrage, préconisait l’organisation d’une sorte de clergé musulman, dévoué à notre cause, MM. Coppolani et Depont arrivent à une conclusion qui n’est pas très différente au fond. Ils pensent qu’on pourrait traiter les chefs et moqaddem des confréries comme des imans honoraires et se servir des khouan pour le développement de nos relations avec les autres pays de l’Islam. Et ainsi, tous les hommes qui ont étudié d’un peu près ces questions sont d’accord pour le reconnaître : dans les pays soumis à la doctrine de Mahomet, il n’y a qu’un seul élément de force, l’idée religieuse, il n’y a qu’une seule organisation un peu puissante, les confréries. Il nous faut surveiller cette organisation et, s’il se peut, utiliser cette force pour la conquête morale des millions de sujets musulmans que nous avons sur la terre d’Afrique.


EDOUARD CAT.

  1. Les Confréries religieuses musulmanes, par MM. Depont et Coppolani ; Alger, 1897, gr. in-8o. L’ouvrage contient 1 carte, 4 chromolithographies, 62 gravures.