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M. Piette[1] pour établir la chronologie des temps quaternaires.

Nous avons des squelettes entiers de plusieurs animaux : Cervus megaceros, avec ses bois immenses ; sa biche, dépourvue de bois ; un gros Ursus spelæus de la caverne de l’Herm, dans l’Ariège ; un plus petit des Oubliettes de Gargas, dans la Haute-Garonne ; une Hyæna spelæa et un Loup du même gisement. Ces trois derniers squelettes nous ont été donnés par M. Félix Regnault ; nous avons placé un dessin des Oubliettes de Gargas pour rappeler les courageuses explorations du savant paléontologiste de Toulouse. Les armoires murales renferment un grand nombre de pièces isolées : morceaux de peau avec poils du Rhinocéros Laineux et du Mammouth, trouvés dans les terrains glacés de la Sibérie ; ossemens du Bœuf musqué, du grand Bison, du grand Bos, du grand Lion des cavernes, etc. ; à côté de ces ossemens, on voit les instrumens travaillés par l’homme. Une vitrine est réservée à ceux qui sont en silex ou en quartzite : haches chelléennes, éclats moustiériens, pointes de lance solutréennes en forme de feuilles de laurier, grattoirs et perçoirs magdaléniens. Une autre vitrine renferme les instrumens en ivoire ou en os : bois de Renne travaillés, dits bâtons de commandement, destinés peut-être à l’attelage des animaux domestiques ; aiguilles, poinçons, lissoirs pour la confection des vêtemens ; flèches pour la chasse, harpons de pêche, sculptures en ronde bosse sur ivoire de Mammouth, sculptures en demi-relief et gravures sur bois de Renne. Il est curieux de constater que, jusqu’à présent, c’est en France qu’on a trouvé le plus d’essais artistiques remontant à l’âge du Mammouth et du Renne. La plupart sont naïfs et grossiers ; cependant quelques-uns révèlent certainement un sentiment esthétique. Quand on pense que leurs auteurs ont eu à lutter pendant une partie des temps quaternaires contre un climat glaciaire et contre des bêtes redoutables, on éprouve un étonnement mêlé d’admiration.

L’âge de la pierre polie dit tantôt néolithique, tantôt premier âge des cités lacustres et des tourbières, occupe le milieu de l’extrémité de notre galerie. On y voit, à côté des animaux actuels,

  1. Suivant M. Piette, à l’époque solutréenne, il y avait encore dans nos pays des Éléphans, de sorte qu’on avait de l’ivoire pour exécuter des objets en ronde bosse ; à l’époque magdalénienne, l’Éléphant était en voie d’extinction, et alors on était réduit à faire des sculptures ou gravures sur des bois de Renne. Le Renne ayant disparu à son tour, nos ancêtres ont travaillé les bois de Cerf.