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récitations automatiques, de ce que l’on appelle le psittacisme, c’est bien celui de l’histoire de l’art. La plus profonde érudition, si elle est purement livresque, n’y vaudra jamais l’expérience qui aura été acquise en vivant dans le commerce et comme dans l’intimité des monumens, cette expérience toute personnelle qui donnera seule à la parole du maître l’accent où vibre l’écho de l’émotion ressentie devant un noble édifice, une fière statue ou une belle peinture.

L’historien le plus curieux de s’instruire n’aura d’ailleurs jamais étudié sur l’original qu’un nombre de monumens plus ou moins restreint, et il ne peut être question d’annexer à chaque lycée une galerie qui contiendrait des antiques et des œuvres de sculpteurs et de peintres modernes. Tout ce que nous demandons, c’est que l’on mette le maître en demeure et en état de présenter aux élèves les images de ces originaux dont il les entretient. Ces images, on peut aujourd’hui, grâce à la photographie, les avoir fidèles, et cela sans grands frais. Il y a diverses manières d’utiliser la photographie. La plus simple, c’est de réunir des épreuves que l’on classe dans un carton et que l’on en tire pour les montrer aux auditeurs du cours. Mais, pour peu que ceux-ci soient nombreux, ils voient mal l’image piquée sur le tableau et, si l’on veut la faire passer de main en main, c’est du temps perdu, c’est le risque couru par toutes ces feuilles exposées au contact de bien des doigts d’écolier.

Il sera toujours avantageux au maître d’avoir ainsi, dans son cabinet, une collection de cette sorte, dont les élémens lui révèlent ou lui remémorent le caractère des formes ; mais il y a une autre façon, plus pratique, de mettre à profit le concours de la photographie. Ce moyen, c’est l’emploi de l’instrument qui est connu sous le nom vulgaire de lanterne magique. Cette lanterne n’était jadis qu’un jouet pour amuser les enfans ; mais, pour y tirer parti des clichés photographiques, on l’a beaucoup perfectionnée, et elle est devenue ainsi un des plus puissans auxiliaires de la parole magistrale. Agrandie autant qu’il le faut pour que tous les traits en soient visibles, l’image est projetée en pleine lumière, au milieu des ténèbres qui remplissent la salle, sur la surface lisse de l’écran ; elle y est maintenue, sous les regards tournés vers elle, aussi longtemps que l’exigent les besoins de la démonstration, tandis que le professeur, du bout de sa baguette, appelle l’attention sur les détails qui lui paraissent la mériter. Peut-on imaginer