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avec quelque vigueur la recherche de moyens de correspondance autres et plus sûrs que les lignes américaines. Il était beaucoup trop tard. Ce n’est pas par des mesures improvisées qu’une organisation de service télégraphique peut être faite à d’aussi grandes distances. Les autres lignes qui desservaient Cuba sans toucher aux États-Unis venaient, par le Sud, aboutir à Santiago de Cuba, à 500 kilomètres de la Havane. Ces lignes n’étaient prolongées jusqu’à la Havane que par des fils terrestres déjà entre les mains des insurgés, et par des câbles immergés le long des côtes, par conséquent très exposés à être coupés. Du jour au lendemain, la Havane pouvait donc être isolée de Santiago, et l’Espagne était menacée de n’avoir aucune communication télégraphique avec le théâtre principal de la guerre où était engagée sa fortune coloniale.

Quelle différence de procédés et de situation du côté des États-Unis !

Le jour même où la guerre est déclarée, l’un des premiers actes du gouvernement est d’appliquer une censure étroite sur toutes les lignes télégraphiques qui peuvent atteindre Cuba. Les câbles de la Floride à la Havane, appartenant à une compagnie américaine, sont saisis et desservis militairement. Toutes les stations américaines, où touchent les autres lignes en relation même indirecte avec Cuba, sont également occupées par des télégraphistes militaires. Une prohibition complète s’applique aux dépêches espagnoles gouvernementales, aux dépêches codées ou chiffrées pour les Indes occidentales, enfin à toute dépêche en clair ayant une tendance hostile aux États-Unis.

Ces premières mesures, toutes rigoureuses qu’elles soient, paraissent insuffisantes. Les Américains veulent isoler complètement Cuba en coupant tous les câbles qui aboutissent sur les côtes de l’île, sauf les câbles de la Floride à la Havane, qui sont déjà entre leurs mains, et dont l’un, relevé à bord d’un navire de guerre, met en communication l’escadre chargée du blocus de la Havane et le gouvernement fédéral à Washington. Trois navires sont rapidement outillés pour couper les câbles : le Mangrove, l’Adria et le Saint-Louis. Dès le 25 avril, jour de la déclaration de guerre, le Mangrove quitte Key-West pour se rendre dans le sud de Cuba avec l’ordre de détruire les câbles qui atterrissent à Santiago, c’est-à-dire les câbles anglais de la Jamaïque et le câble français d’Haïti.