Vous soupiriez, ma triste enfant, et j’étais las.
Nous nous tûmes, l’amour parla longtemps.
Hélas !
Octobre à son manteau d’azur fourré de vair
Arbore ce matin les joyaux de l’hiver.
Le ruisseau fume, un fin brouillard couvre la berge,
Le jardin blanc miroite au soleil, l’herbe fond
Et rit, et ses colliers de perles se défont.
Le givre et l’araignée ouvragent d’argent vierge
Le buis noir et la treille et les rosiers.
Et toi,
Qui foules, attentive au craquement des feuilles,
Le sol éblouissant et dur, pleine d’émoi
Et de pitié, d’un doigt malhabile, tu cueilles
Toute cette rigide et vaine floraison :
L’œillet, charme odorant de l’arrière-saison,
Les dahlias ruches et lourds, les tristes roses
Etreintes par leur froide armure de cristal.
Et te sachant mourir, hélas ! du même mal,
Tu formes un bouquet de tes sœurs et tu poses
Tes lèvres à leur sein glacé, pieusement,
Tandis qu’ivre d’amour et d’un secret tourment,
Mes yeux mêlés aux tiens que la lumière dore,
Je cherche, ô mon enfant trop pensive ! à puiser
Sur ta bouche en un long et sanglotant baiser
Ces parfums qu’une fleur gelée exhale encore.
CHARLES GUERIN.