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une première conséquence ; il y en a d’autres encore ; la pire de toutes est dans l’affaiblissement de la discipline attaquée dans son principe même. Il n’est pas un homme politique qui n’en gémisse, mais il y en a bien peu qui fassent autre chose qu’en gémir et qui aient le courage de secouer le joug des sollicitations administratives. La proposition de M. Berthelot les mettra plus à l’aise pour s’en affranchir. La défense sera plus facile, lorsqu’il faudra une loi en dehors du budget pour augmenter les traitemens, les pensions, etc. Et de quelle surcharge écrasante le budget ne se trouvera-t-il pas allégé ! Non seulement le budget, mais sa discussion elle-même, car, si elle dure si longtemps et si le régime des douzièmes provisoires est devenu permanent, on le doit en grande partie à ces multitudes d’amendemens qui attachent leur poids lourd à chacun de ses chapitres, et quelquefois même de ses articles ! Tout le monde devrait considérer le budget comme le navire qu’il faut conduire à bon port : en fait, il n’est pas plutôt lancé en mer que tout le monde se range en bataille contre lui, tire contre ses flancs et y fait mille ravages. En tout cela, une seule chose est oubliée, c’est l’intérêt général toujours subordonné aux intérêts particuliers. Il a fallu que le désordre fût bien grand pour que la Chambre s’en soit finalement émue ; mais elle l’a fait, et si le passé reste irréparable, peut-être l’avenir sera-t-il un peu meilleur. Qui aurait cru que le remède viendrait d’un radical aussi bon teint que M. Berthelot ? Les voies d’en haut sont insondables !


On dit aussi que ce sont deux députés radicaux qui, dans la commission chargée d’étudier le projet de loi présenté par le gouvernement sur les associations, ont combattu et fait amender une des dispositions essentielles de ce projet. Mais d’abord ce projet, dont nous avons déjà parlé et sur lequel nous aurons sans doute à revenir plus d’une fois encore, est-il vraiment un projet de loi sur les associations ? S’il en était ainsi, et quand bien même il n’aurait pas complètement réussi dans l’élaboration d’une œuvre aussi considérable, difficile et délicate, il faudrait féliciter le gouvernement de son initiative. Le droit d’association n’existe pas en France : il y a des associations agréées ou tolérées, mais il n’y en a pas qui aient de plein droit une existence légale, puisqu’il y a des lois qui les empêchent et les condamnent, mais qu’il n’y en a pas qui les autorisent et en principe les réglementent. Cette situation, vraiment intolérable, n’en dure pas moins, plus de cent années après notre grande révolution. Le gouvernement se propose-t-il vraiment de la faire cesser ? Son objet est tout autre.