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obligés de conserver en dépôt avec interdiction de la vendre, aussi longtemps que les prix restent en deçà des limites fixées ; 3° les prix en deçà desquels ledit dépôt doit être maintenu. Le sucre produit au delà du chiffre fixé pour la consommation indigène est considéré comme excédent de production et frappé d’un impôt supplémentaire de 1 rouble 75 par poud, qui double donc le taux de l’accise. Cet excédent est réparti entre les fabriques proportionnellement à la quantité produite par chacune d’elles au delà de 60 000 pouds (environ 10 000 quintaux). L’accise est restituée sur les sucres exportés à l’étranger.

D’autres pays, comme l’Italie, qui ne jouaient, jusque dans les dernières années, qu’un rôle nul comme producteurs de betteraves, ont voulu provoquer le développement de l’industrie sucrière : le sucre y est taxé à raison de 1 500 grammes par 100 hectolitres de betterave, alors que l’extraction moyenne réelle atteint déjà près de 2 kilogrammes, si bien que le fabricant a un quart environ de sa production indemne ; aussi la production annuelle s’est-elle élevée, de 11 471 quintaux en 1893, à environ 80 000 en 1899.

Nous avons réussi en France, au moyen de la législation que nous avons exposée, et qui part d’un principe analogue à celui qui a inspiré celle de divers États de l’Europe centrale, à rendre une grande prospérité à l’industrie sucrière. Mais nous n’en devons pas moins reconnaître le côté un peu factice et fragile de la situation. Grâce à ce système, les Anglais achètent notre sucre à un prix qui n’atteint même pas la moitié de celui que nous le payons, puisque la taxe de 64 francs par quintal dépasse le double de la valeur actuelle du produit, tel qu’il sort de la fabrique ou même de la raffinerie. Le pays qui ne produit pas de sucre l’obtient à bien meilleur marché que celui qui le fabrique. Mais il ne nous a pas suffi d’exempter d’impôt le sucre que nous exportons ; nous avons constaté que ce sucre, même affranchi de tout droit, ne pouvait pas soutenir la lutte avec le sucre allemand et le sucre autrichien, parce que ces derniers, dégrevés comme le nôtre, recevaient en outre une prime à la sortie de leurs pays d’origine : nous avons alors suivi leur exemple et bonifié, à l’exportation, des primes à nos sucres indigènes. Comme nous ne pouvions prélever les millions nécessaires à ces bonifications sur les fonds généraux du budget, nous avons élevé les droits intérieurs d’une quantité proportionnelle : l’impôt a été porté de 60 francs à