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REVUES ÉTRANGÈRES

UNE NOUVELLE BIOGRAPHIE DE HENRI HEINE


Heinrich Heine, Aus seinem Leben und aus seiner Zeit, par G. Karpeles, 1 vol. in-8o illustré, Leipzig,


Lorsque, en 1841, dans une de ses chroniques, Henri Heine appelait Musset « le plus grand des poètes français après Béranger, » et les proclamait tous deux, Béranger et Musset, « infiniment supérieurs au trop vanté Victor Hugo, » il exprimait à la fois son opinion personnels et l’opinion du public allemand à qui il s’adressait. On peut bien dire, en effet, que, pendant un demi-siècle, l’Allemagne a regardé Béranger comme le plus grand des poètes français ; et, aujourd’hui encore, ni « le trop vanté Victor Hugo, » ni Lamartine, ni Musset lui-même n’ont, au delà du Rhin, une célébrité comparable à celle de l’inventeur du « Dieu des bonnes gens. » Là ! célébrité de Béranger en Allemagne n’a été dépassée, peut-être, que par celle d’un brave homme de maître d’école bourguignon nommé Claude Tillier, auteur d’un roman, Mon Oncle Benjamin, dont la traduction par Ludwig Pfau, vieille déjà de plus de quarante ans, continue à rester pour les Allemands une œuvre classique. Tous les jours des critiques, à Berlin ou à Vienne, nous reprochent de méconnaître Béranger et Tillier ; et quand nous leur faisons voir notre surprise de l’ignorance où ils sont des gloires véritables de notre littérature, ils nous répondent que notre attitude à l’égard de la littérature allemande n’est ni moins arbitraire ni moins impertinente. « Car non seulement, — nous disent-ils, — vous refusez de vous intéresser à nos grands poètes et à nos grands romanciers, à Gottfried Keller, à Théodore Fontane, à Frédéric Hebbel et à Grillparzer, mais