Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 160.djvu/959

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

déjà que certaines difficultés, ou pour le moins certaines hésitations se sont produites sur le choix de l’officier général qui serait chargé de commander le corps expéditionnaire. Il avait d’abord été question d’un Japonais, et cela aurait peut-être été dû à l’importance du contingent japonais, au courage qu’il a montré dans maintes circonstances et aux services qu’il a rendus : cependant un pareil choix devait soulever des objections, et on ne voit pas trop les vieilles armées de l’Europe rangées sous le commandement supérieur d’un officier japonais : ce serait aller un peu vite dans la voie de l’assimilation. Les Anglais auraient accepté malaisément un général russe, et les Russes un général anglais. Le contingent italien est trop faible pour que l’honneur du commandement suprême soit dévolu à son chef. La France, pour les motifs que nous avons indiqués plus haut, n’a montré aucune prétention à jouer le rôle principal. La place restait libre à l’Empereur allemand : il en a profité, et on a appris tout à coup que le maréchal de Waldersee allait partir pour l’Extrême-Orient. Nous ignorons si les puissances ont été au préalable pressenties sur ce choix, ou si on s’est contenté de leur en proposer ensuite l’acceptation. Des souvenirs sur lesquels il est inutile d’insister ont pu, au premier moment, nous causer une impression de malaise, à la pensée qu’une troupe française serait éventuellement commandée par un officier allemand : peut-être faut-il s’en affranchir. Nous n’avons aucune opposition à faire à la désignation du maréchal de Waldersee. Seulement, s’il va à Tientsin, quand arrivera-t-il ? Au plus tôt dans deux mois, ce qui paraîtra bien tard. À la vérité les derniers renforts ne sont pas encore partis, ou ils ne partent que ces jours-ci pour la Chine ; mais il n’est pas prouvé qu’il faille inévitablement les attendre pour accentuer le mouvement sur Pékin. L’heureux combat de Peï-Tang en est la preuve. Obligera-t-on l’armée alliée, même si elle se sent en force de marcher immédiatement sur la capitale à attendre patiemment l’arrivée du maréchal de Waldersee ? Faudra-t-il qu’elle s’arrête, si la fortune la favorise et si elle trouve la voie libre devant elle ? Le contingent allemand refuser a-t-il d’aller de l’avant, ou mettra-t-il même moins d’ardeur à le faire jusqu’à l’arrivée du maréchal de Waldersee ? Pour tous ces motifs, qui ne tiennent en rien à la personne d’un officier dont tout le monde reconnaît la grande valeur, il aurait sans doute mieux valu désigner un général qui fût dès maintenant arrivé à Tientsin et à la tête de ses troupes. Et enfin, M. Pichon, lorsqu’il a écrit son télégramme, ne calculait vraisemblablement pas que la marche de la colonne de secours ne pourrait commencer que dans deux mois ! Qui