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SOUVENIRS
DE LA
NOUVELLE-GRENADE

I
DE LA MER A LA MONTAGNE


Un matin de juillet 1897.

… Des fonds vaporeux de la mer, en pleine gloire dans l’aurore, se dégage lentement, tache blanche par tache blanche, Puerto Colombia.

Bien vite, d’autres détails précisent un grand paysage cuivré de lumière, momifié dans cette torpeur vaguement inquiétante au premier abord, des pays chauds. Sur tout le fond se développe la côte, massive et verticale, fumeuse et roussâtre, qui prolonge quelque temps sa table hautaine, puis tourne brusquement dans l’ouest, non sans laisser derrière elle, en fuyant, une coquetterie, un falbalas, ce cap à la chute moelleuse. Elle tourne encore vers lui d’autres crêtes plus éloignées, ondulations d’azur, tristes, délicieuses, en retraite sur la nuance pâle et diffuse du ciel. Tirée du rivage qui, maintenant complété, s’incurve avec une mollesse ineffable, une ligne noire, ténue comme un fil, partage en deux la scintillation plus rouge que nacrée des eaux, cette tranquillité de belle conque marine. Si l’on approche, cela devient une fine jetée de fer où un train attend — nous attend. Elle grossit presque