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trois à six mois, selon l’avis du médecin-directeur et la gravité du cas, et, si la cure a été bien conduite, ils en sortiront guéris, ou du moins très améliorés et capables de reprendre leur travail. Par la discipline du sanatorium et par l’exemple de leurs camarades, ils auront appris à se soigner et à ne pas contaminer leur entourage ; rendus à leur famille, ils y porteront ces notions d’hygiène pratique et serviront ainsi puissamment la cause de la prophylaxie.

Ce programme si rationnel n’est cependant pas accepté sans résistance par l’opinion médicale ; on lui a opposé diverses objections, d’ordre sentimental pour la plupart, qu’il convient de réfuter brièvement.

On s’est d’abord effrayé à l’idée que, pour décider les tuberculeux à entrer en temps utile au sanatorium, il faudrait leur faire connaître la véritable nature de leur maladie, ce que les médecins, en France du moins, hésitent, toujours beaucoup à faire, craignant relief d’une telle révélation sur le malade et sur sa famille. — Or, l’expérience a depuis longtemps fait justice de ces craintes : le tuberculeux auquel on révèle la nature de son mal, en lui donnant, avec l’assurance de sa guérison possible, les moyens de la réaliser, est d’ordinaire reconnaissant envers l’homme qui a eu la franchise de l’éclairer. La première émotion surmontée, il se reprend en général très rapidement et se décide sans hésitation aux sacrifices nécessaires ; à partir de ce moment, il devient souple, résigné, prêt à tout ce qu’on voudra lui prescrire. Il prend intérêt à la stérilisation de ses bacilles et témoigne un vif désir de ne pas infecter son entourage.

Une autre objection, souvent mise en avant contre la réunion d’un grand nombre de tuberculeux dans un même établissement, est fondée sur la crainte qu’ils s’inspireraient réciproquement et sur l’influence déprimante qu’exercerait chez chacun d’eux la vue des souffrances des autres. Cette idée serait peut-être justifiée s’il s’agissait de phtisiques avancés, d’individus cachectiques et incurables ; encore ne tient-elle aucun compte de l’optimisme particulier à ces malades et de la ténacité avec laquelle (tous les médecins le savent) ils espèrent contre tout espoir. Mais les malades qu’il s’agit d’envoyer dans les sanatoriums populaires ne sont pas des incurables : ils sont, au contraire, dans les meilleures conditions pour guérir, et s’en aperçoivent rapidement à leur appétit qui revient, à leur fièvre qui disparaît, à