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LE PEUPLE CHINOIS ET LA RÉFORME.

En fait de métiers et de travail, l’art à part, les Chinois en sont à peu près au même point que nous en étions nous-mêmes avant la découverte de la vapeur : — cette remarque ne semble-t-elle pas d’un coup les rapprocher singulièrement de nous ? Pour préciser, ils ont le tissage, et tous les genres de métiers à main : la céramique, où ils sont nos maîtres, l’imprimerie à types mobiles, la teinture, la sculpture sur bois et métaux, toutes les petites industries au burin, au tour, à la forge, l’architecture, l’agriculture, très développée, et tous les genres de cultures, etc. ; ils nous ont précédés en tout cela, mais, leurs procédés étant comme eux immuables, tout est maintenant suranné. Les sciences et la vapeur révolutionneront leurs méthodes dont peu subsisteront ; il leur faut : filatures, usines, métallurgie, mines, — ils les exploitent à peine, — génie rural et forestier, — la Chine est déboisée, — machines, voies ferrées, steamers, postes et télégraphes, déjà commencés, etc. Ces innovations détermineront un accroissement rapide dans la production et le gain, et, dans la même proportion, la richesse, le bien-être, le luxe. Nous avons affaire au peuple le plus frugal de l’univers ; il y a tout un monde d’améliorations à lui ouvrir et de nouveaux besoins à lui révéler qui le changeront dans ses habitudes, ses idées, ses tendances. La transformation sera lente, et, comme l’expérience l’a démontré dans nos pays, ne s’accomplira pas sans frottement, sans tapage, mais pourtant sans révolution, car l’impulsion viendra d’en haut, l’autorité y aidera ; et le peuple, toujours obéissant d’ailleurs, y découvrira vite son intérêt. Le succès d’un innovateur convertira ses voisins, et chaque nouveau procédé s’implantera. C’est là surtout que les admirables qualités du Chinois viendront à son aide : — pauvre, il n’y a pas de trop petits gains pour lui, il est infatigable, actif, toujours content ; moins besogneux, les moindres détails l’attirent, il devient méticuleux, chercheur, ingénieux. Déjà, dans l’Inde anglaise, dans nos colonies, au Japon, en Amérique, en Australie, la race a montré tout ce qu’elle valait en résistance, en adresse, en activité, parce que, là, elle trouve à développer ses qualités : les Chinois sont des travailleurs sans rivaux. Les corporations n’existent pas ; chacun tisse, fabrique, forge, travaille chez soi, comme il peut, comme il l’entend. Les associations qui deviendront nécessaires pour l’établissement d’une usine seront toujours des entreprises très bien organisées, très fortes, et, protégées comme elles