1875, « arrachée à la lassitude d’une assemblée monarchique découragée de son rêve, » a le caractère d’un aménagement provisoire, transactionnel ; c’est la première en France qui n’ait proclamé aucun principe abstrait, aucun dogme philosophique ou humanitaire. Ses auteurs y travaillèrent sans illumination mystique et sans allégresse, à l’anglaise, pour parer aux besoins du moment : c’est peut-être pourquoi elle a duré plus que ses devancières. Voilà qui n’est pas mal jugé. M. Bodley retrace les physionomies des présidens successifs, gardiens honoraires de cette constitution. Il parle d’eux avec indulgence, avec sa courtoisie un peu énigmatique. Seul, ce pauvre M. Grévy passe un mauvais quart d’heure. Il semble que son historien connaisse par le menu les services que ce président se rendit à lui-même, et qu’il ignore les services discrets, efficaces, que l’adroit vieillard rendit au pays.
Le Sénat républicain n’a point laissé des impressions très vives au visiteur. Le Luxembourg lui a offert l’image « d’une retraite de vieux lettrés, dont les facultés ne sont pas encore obscurcies, et dont le passe-temps favori est de se réunir en conférence académique, pour se communiquer les uns aux autres des dissertations sur des questions de droit et d’histoire, avec des allusions de temps à autre aux faits du jour. Le président prend possession de son fauteuil avec calme et donne le ton des discussions de l’après-midi, en prononçant, dans un langage admirable, l’éloge funèbre d’un de leurs collègues enlevé par la mort. Il raconte la vie du défunt, sous la Restauration et la monarchie de Juillet, jusqu’à la seconde République, époque ordinairement pleine de glorieuses promesses pour le sénateur disparu, si Louis-Napoléon n’avait pas étouffé un génie destiné à étonner l’Europe. »
Une bonne part du volume est naturellement consacrée à la Chambre des députés, à son œuvre législative, à son recrutement électoral. Pour définir ce dernier, M. Bodley s’est modestement effacé derrière l’autorité de Jules Ferry ; il reproduit une page d’un pamphlet écrit sous le second Empire par le futur ministre républicain : « Appliquée au suffrage universel, la centralisation a montré tout ce qu’elle pouvait faire... » La citation continue, vengeresse, et celui qui l’a choisie estime qu’on ne saurait mieux dire, ni dire autrement aujourd’hui. Ce n’est pas le seul tour que ce terrible homme joue à Jules Ferry ; il le cite à nouveau dans le chapitre où il traite de la corruption sous la troisième