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Page:Revue des Deux Mondes - 1901 - tome 3.djvu/699

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actuel les assemblées où il admirait, entre autres lumières, Lanfrey, Schérer, Hippolyte Carnot, Barthélémy Saint-Hilaire… J’eus l’honneur de connaître quelques-uns de ces personnages illustres ; et, si peu recevable que soit ici l’avocat, je garantis à M. Bodley qu’il trouverait au Palais-Bourbon vingt jeunes hommes d’une valeur au moins égale, pour ne pas dire plus, à celle de ces morts décoratifs.

Là, comme partout en France, — et, s’il l’a vu, peut-être ne l’a-t-il pas assez dit, — il trouverait dans toutes les conditions une réserve incalculable de talens, de bonnes volontés, d’énergies inemployées ; de quoi encadrer dignement ces populations rurales, provinciales, auxquelles il rend un juste hommage. Un parlementarisme mal conçu, mal appliqué, fait émerger les plus nuisibles élémens ; et paralyse ces forces vives ; elles languissent dans un pessimisme dont la diffusion a surpris notre visiteur, parce qu’il l’a senti contraire au tempérament national ; elles attendent le metteur en œuvre, — c’est la thèse même de M. Bodley, — qui est réclamé par les instincts de notre race, par ses institutions permanentes, par ses défauts comme par ses qualités. Tous les Français en conviennent, conclut leur confident, dès qu’on les interroge dans le privé ; mais il craint que l’ensorcellement de certaine mots cabalistiques et le respect des dieux étrangers n’empêchent toujours ces timides de proclamer leur vouloir intime. Pauvres Français ! Il a fallu qu’un Anglais parlât pour eux ! Et il les met dans l’embarras. N’a-t-il pas dit que tous leurs maux provenaient du « Snobisme » des philosophes, ces imprudens qui allaient chercher leur médecine à Londres ? Milord Chesterfield nous conseillait le laxatif libéral : le spirituel auteur de la France nous prescrit le tonique autoritaire ; à quels Anglais croirons-nous ?


Eugène-Melchior de Vogüé.