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à la question du Travail, qui se décompose en une série de questions ouvrières. Suivant une marche prévue, on avait débuté par des généralités, on va en spécialisant. L’attaque n’est pas moins violente, ni la critique moins âpre ; mais ce n’est plus la société en général, ni toute société, qu’on attaque sur toute la ligne, dans son être et dans son principe : c’est la société d’aujourd’hui dans sa structure et dans sa forme, la forme présente de la société telle qu’elle résulte de la forme d’industrie qui prévaut ; c’est cette forme même d’industrie ; et, dans l’industrie, c’est la concurrence et la mauvaise organisation, ou la désorganisation, ou la non-organisation du Travail. Quoique au fond il s’agisse toujours d’une refoule de la société tout entière, au dehors et dans l’expression il ne s’agit même plus d’une « réorganisation de l’industrie, » ce qui est encore vague, mais de la réorganisation ou de l’organisation du Travail. La réorganisation de l’industrie, c’était bon au temps de l’Harmonie, avant « la lutte des classes, » mais là, sur le terrain de la lutte des classes, le but, l’objectif, c’est l’organisation du Travail. Généreusement, mais vainement on avait voulu faire de l’industrie, patronat et prolétariat réunis, entrepreneurs et ouvriers réconciliés, une sorte de Confédération des forces productives ; on veut maintenant faire du Travail une manière de Sonderband, la Ligue séparée des forces ouvrières contre les forces patronales. Qu’on ne s’assemble pas pour élaborer une constitution défensive et conservatrice ou même progressive de l’Industrie ; mais, au contraire, qu’on se retranche pour élaborer une constitution offensive, rénovatrice et même révolutionnaire du Travail : point de paix sociale, tant que durera la forme présente de la société ; la guerre sociale, jusqu’à ce que, sur cette société abattue, se dresse une société tolérable, laquelle ne sera tolérable que si elle est faite ainsi, et non autrement, que si elle est à nous, et non aux autres, que si c’est la société aux ouvriers, la société du Travail.

Posée en ces termes ou en termes à peine moins tranchans, passée tout de suite à l’état aigu, la question s’impose à tous les gouvernemens, à tous les partis, à tous les citoyens, à toutes les écoles, à tous les esprits, à quiconque pense et à quiconque vit : et il faut penser, puisqu’il s’agit de vivre, il faut se déclarer pour ou contre, attaquer ou se défendre, — mais nul ne peut rester indifférent, ou nul du moins ne peut plus ignorer. Et c’est encore